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Jacques Brunel a-t-il vu le match Irlande-France ?

Justice au Singulier - philippe.bilger, 11/03/2019

Mais je suis certain que Jacques Brunel n'a pas vu le match. En tout cas pas le même que nous tous.

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On a des ambitions, des espérances. C'est sûr, on va trouver le bon sujet, le lundi est un excellent jour, riche d'une multitude de thèmes possibles, politiques, judiciaires, culturels ou autres. On aura des commentaires favorables, bienveillants, d'autres hostiles et critiques mais aucun ne traitera mon billet avec dérision puisque j'aurai été sérieux selon les critères classiques, convenus. On ne pourra pas me prendre en flagrant délit de futilité !

Pourtant je transgresse, je m'échappe. Il a suffi que je lise cette phrase de l'entraîneur du XV de France Jacques Brunel pour qu'immédiatement, après la déroute du 10 mars, j'aie envie de réagir. De protester. De désespérer.

Il a déclaré : "Je n'ai pas d'inquiétudes" (Le Figaro).

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Ma passion et ma nostalgie du grand rugby - les frères Boniface, Gachassin, Blanco et quelques autres - n'auraient pas été suffisantes pour faire un sort à ce propos affligeant si à sa manière il n'était pas révélateur d'une France qui sur tous les registres décline, non seulement à cause de ses échecs mais de l'incapacité de les reconnaître et d'en tirer les conclusions qui conviendraient. On ne change pas un système qui fait fiasco.

Par exemple, en s'interrogeant sur les pratiques de pays étrangers qui gagnent quand on perd, qui s'illustrent quand on tombe.

Surprenant pays qui exagère ses cocoricos et ferme les yeux sur ses faillites.

Jacques Brunel, ce parfait honnête homme, offre la démonstration éclatante d'un Français qui a de hautes responsabilités sportives, soutenu mordicus par un Bernard Laporte très contesté, mais est incapable, les catastrophes survenues, de se remettre en cause.

Ce n'est pas de la bêtise mais de l'inconscience. On est enkysté dans son rôle, dans sa fonction et la peur de devoir les quitter - pas de risque pourtant ! - fait qu'on se garde bien d'une contrition qui pourraient rejaillir sur vous. Dire ce qui a été serait se détruire soi-même.

Pire, après une première mi-temps incroyable de possession et d'emprise irlandaises - l'entraîneur irlandais, félicitant son équipe, a relevé qu'il n'avait jamais vu dans sa carrière une telle domination - et une seconde partie où sûrs d'être victorieux les Irlandais ont lâché du lest dans les cinq dernières minutes, il a fallu attendre la réaction de certains joueurs de l'équipe de France, effondrés, lucides et, pour le futur, pessimistes, afin d'entendre et de lire la vérité (L'Equipe).

Je me rappelle qu'après le remarquable Guy Novès qui n'avait pas su ou pu donner à l'équipe de France le formidable esprit et jeu toulousains - pas les mêmes joueurs évidemment ! - on avait voulu laisser sa chance à Jacques Brunel malgré les déplorables conditions d'éviction de son prédécesseur.

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Un bilan déjà calamiteux, humiliant, avec des joueurs en même temps courageux mais ridiculisés.

Jacques Brunel est venu, n'a rien vu et n'a pas vaincu.

Mais rassurons-nous : il n'a pas d'inquiétudes.

Vite, pour nous sauver dans les quelques mois à venir, un très grand entraîneur étranger s'il reste, qui sait ?, par exemple un Néo-Zélandais sur le marché.

A mon avis, avec ce titre, je croyais plaisanter.

Mais je suis certain que Jacques Brunel n'a pas vu le match.

En tout cas pas le même que nous tous.


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