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Tentative d’assassinat à 13 ans

Actualités du droit - Gilles Devers, 3/10/2012

C’était le 15 mai 2009, au collège François-Mitterrand de Fenouillet, près...

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mineurs, crime, prison, JusticeC’était le 15 mai 2009, au collège François-Mitterrand de Fenouillet, près de Toulouse. La veille, une prof de math avait collé une punition à un élève de sa classe de 5°, âgé de 13 ans, pour un devoir non rendu. Ce 15 mai, l’élève vient voir la prof et lui demande de retirer la punition, ce que la prof refuse.

«Bien, je vais te tuer ».

L’élève sort un couteau, et porte un coup au thorax, un coup prémédité et potentiellement mortel.

La victime a pu être soignée, et elle a depuis repris ses activités d’enseignement.

Le collège était connu pour être tranquille, et le gamin était sans histoire. L’irruption soudaine de la plus extrême violence…

Le sinistre de l’Education nationale de l’époque était Darcos Xavier, qui avait fait preuve d’un grand sang-froid et d’une parfaite analyse de la situation… en annonçant la mise en place de portiques de sécurité dans les colléges ! Bien vu, gros malin ! Excitons les peurs, ça fait progresser la société... Et c’était parti comme en quatorze, avec le tintamarre joyeux des répressifs apeurés, le festival de l’Internationale des redresseurs d’enfants, la rave party des cinglés de la famille au carré, la séance d’hallucination collective des traqueurs de laxisme, la chorale des pucelles sociales pleurnichant sur la perte des valeurs… De Gaulle disait que les Français sont des veaux… peut-être, mais avec ascendant mouton.  

Heureusement, la justice est confiée à des gens sérieux, qui étudient et réfléchissent avant de parler. Ça aide.

Le procès s’est tenu ce 2 octobre, alors on peut faire le bilan.

Le cadre, c’est le tribunal pour enfants de Toulouse, qui applique la grande ordonnance de 1945 sur les mineurs : l’autorité par l’application de la loi, l’intelligence par les mesures éducatives. Le procès se tient à huis clos, mais on en sait assez pour poser quelques données d’analyse.

D’abord, le gamin n’a jamais été incarcéré. Douloureux dilemme pour le juge, qui a du statuer dès le lendemain de faits, et qui avait quelques heures pour réunir le plus grand nombre d’informations et jauger la personnalité de cet enfant.

A 13 ans, la prison est possible pour crime. Mais le juge avait fait le choix d’éviter la bascule de l’enfermement carcéral. Le gamin a été placé un an dans un centre fermé, et depuis deux ans et demi, il était pris en charge dans un foyer doté d'une équipe renforcée d'éducateurs.mineurs, crime, prison, Justice

Le tribunal a pris son temps pour juger, et on imagine que tout a été fouillé pour comprendre : interrogatoires minutieux, auditons des proches, examen des années passées, expertises psy, enquêtes de personnalité, compte-rendu des soins pratiqués et analyse du travail éducatif entrepris. Ce temps passé avant l’audience compte beaucoup pour cerner la personnalité d’un enfant, qui évolue si vite entre 13 et 16 ans.

L’audience elle-même a duré 12 heures, et le jugement rendu est conforme aux réquisitions du parquet : cinq ans de prison, dont deux ans ferme.

Comme l’a expliqué Maître Boquet, l’un des avocats de l’enfant, le tribunal a prononcé une peine de prison ferme « pour marquer le coup d'un acte particulièrement grave », mais il a « ouvert la porte » en fixant dès le 6 novembre l'audience d'aménagement de la peine. C’est que le 6  novembre, on discutera des mesures de contrainte et du cadre éducatif strict qui peut être mis en place, et qui, s’il est bien suivi, peut permettre d’éviter l’incarcération. L’avocat de la victime s’est exprimé sur le même registre.

La presse donne des échos des déclarations des uns et des autres, dont l’expert, mais il est trop aventureux de se faire une idée de faits si complexes à partir de ces éléments trop épars.

En revanche, on voit bien le mécanisme du droit des mineurs. La justice se prononce, avec l’application de la loi commune et la fonction cathartique  du procès. Mais dans le même temps, joue le processus éducatif, efficace car il est conduit par des professionnels et dans la contrainte de la loi. La répression, nécessaire, compte, mais elle ne doit pas remettre en cause le travail éducatif de l’enfant.

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