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Procès PIP: « On m’avait dit que c’était la Rolls des prothèses »

Chroniques judiciaires - Pascale Robert-Diard, 25/04/2013

Elle est vaste, cette salle du Parc des expositions de Marseille dans laquelle a été installé le tribunal qui juge les cinq prévenus de l'affaire PIP. Elle devient immense lorsque, à l'appel de leur nom, les femmes qui se sont … Continuer la lecture

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Elle est vaste, cette salle du Parc des expositions de Marseille dans laquelle a été installé le tribunal qui juge les cinq prévenus de l'affaire PIP. Elle devient immense lorsque, à l'appel de leur nom, les femmes qui se sont constituées parties civiles, s'avancent à la barre pour témoigner. Blondes et brunes, grandes et petites, jeunes et moins jeunes, fluettes ou arrondies, elles marchent tour à tour sous les regards, dont elles doivent sentir qu'ils se posent sur leur silhouette et plus encore, sur leur buste.
Valérie, Joëlle, Patricia, Christine sont quelques unes des centaines de femmes qui se sont constituées parties civiles contre le président et les principaux cadres de la société de fabrication de prothèses mammaires PIP. La majorité d'entre elles ont eu à combattre un cancer de sein suivi d'une ablation, d'autres ont ressenti le besoin d'avoir une nouvelle poitrine après plusieurs maternités ou simplement parce qu'elles la rêvaient autrement.
Toutes se sont fait implanter en confiance des prothèses PIP. "On m'avait dit que c'était la Rolls, et j'étais rassurée parce qu'elles étaient françaises".
Chacun de leur parcours est singulier, mais l'épreuve traversée est la même. Implantation, suintements, douleurs, angoisses, consultations, nouvelle opération, réimplantation, et l'angoisse à nouveau lorsqu'en 2010 elles sont alertées par les autorités sanitaires des dangers de ces prothèses, de leur retrait du marché et des recommandations d'explantation.
"Jusque là, raconte Christine, j'avais tout accepté. J'étais dans l'aléa. L'aléa de la maladie. L'aléa des complications liées à l'implantation. Mais là, ma colère a éclaté. Je n'étais plus dans l'aléa, j'étais dans la tromperie. Et ça, c'était inacceptable".
Sa main se pose sur sa poitrine quand elle dit, face au tribunal, qu'elle vient de subir une cinquième opération pour retirer ses prothèses.
"Cette opération, je ne la voulais pas. Mais j'ai cédé sur la pression de ma famille, qui avait peur pour moi. Et on a trouvé du silicone dans mes tissus. Qui peut m'affirmer aujourd'hui que dans six mois, je n'aurais pas de nouveaux problèmes?"
Christine se tourne à demi vers les prévenus. Elle les a entendus expliquer à l'audience qu'ils savaient tous que le gel utilisé n'était pas celui qui était certifié, qu'ils avaient fait ce qu'ils avaient pu ou qu'ils subissaient l'autorité du fondateur de la société PIP, Jean-Claude Mas. Elle a entendu les autres cadres de l'entreprise, cités comme témoins à la barre, évoquer cette multitude de petites lâchetés, qui les a retenus de démissionner ou d'alerter.
Elle ne les accepte pas. "Quand on est une patiente, on espère que face au Geo-trouve-tout ou face au professeur Tournesol (Jean-Claude Mas) on a des gens qui, dans l'entreprise, sont des gendarmes. Vous étiez directeur qualité, responsable des produits, ingénieur, vous saviez et vous avez laissé partir des lots.
Elle en veut aussi aux "certificateurs"qui se retrouvent aujourd'hui parties civiles contre PIP, comme elle.
Etre assise à côté de vous, ici, ça me sidère! Pour nous, il allait de soi que ces produits étaient hypercontrôlés. On compte sur les certificateurs, nous! Et tout d'un coup, on découvre que la norme, ce n'est que ça, que l'entreprise déclare et qu''on lui accorde la certification. Les verrous n'ont pas fonctionné et ça, c'est scandaleux!.
Christine a entendu aussi ce psychiatre évoquer le "préjudice de l'anxiété" dont peuvent souffrir les victimes et qu'il reviendra au tribunal d'évaluer.
Elle dit simplement: "Moi, je ne souffre pas du syndrome de l'anxiété. Mais j'ai celui de la perte de confiance totale dans tout ce qu'on nous dit sur ce que l'on peut respirer ou ingérer."
Avant de rejoindre les bancs du public, elle ajoute: "Je n'ai pas de haine, vraiment pas. Du mépris, certainement. Je vous laisse à vos problèmes de conscience."


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