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Scandale à Cayenne, scandale à Nanterre !

Justice au singulier - philippe.bilger, 19/07/2014

Mais Sofiane Rasmouk réincarcéré seulement le 12 août 2013, Priscilla et Sandra constituent, eux, un trio qu'on n'oubliera pas. Parce que le premier doit beaucoup à la justice et que les secondes ne lui doivent rien.

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A peine a-t-on dénoncé une justice d'exception à Cayenne qu'une autre affaire vient - dans un tout autre registre car criminel - mettre en cause le fonctionnement de la justice ordinaire à Nanterre au cours de l'année 2013.

Alors qu'un jugement du tribunal correctionnel de Cayenne a condamné à neuf mois de prison ferme une prévenue exclue du Front national parce qu'elle avait comparé Christiane Taubira à un singe, Sofiane Rasmouk avait été placé sous le régime de la semi-liberté le 12 avril 2013.

Quand une action engagée par une association co-fondée par Christiane Taubira a donné lieu à une citation directe approuvée par cette dernière et a abouti à cette sanction disproportionnée à Cayenne, le 7 août 2013 Sofiane Rasmouk avait agressé avec sauvagerie, en lui portant de multiples coups et en tentant de la violer, Priscilla A., âgée de 32 ans, la laissant pour morte, le cerveau gravement endommagé.

Avant que les magistrats de Cayenne condamnent financièrement le Front national pour sa responsabilité parce qu'il aurait dû s'assurer préventivement des convictions républicaines d'Anne-Sophie Leclère, dans cette même soirée du 7 août, Rasmouk avait tabassé et violé à deux reprises Sandra G., une jeune fille de 20 ans, qui survivra.

Avant que cette argumentation politique aberrante soit développée à Cayenne, Sofiane Rasmouk avait regagné son centre de détention à neuf reprises "avec un retard important sans justification", avait fourni de fausses excuses, n'avait pas dormi une nuit à la prison, avait été absent sans motif durant deux jours dans un emploi d'insertion au service d'une supérette et s'était adonné à l'alcool.

Alors qu'à Cayenne, la justice se félicitait d'avoir montré de quoi elle était capable, Ghislaine Stenger, la mère de Priscilla, s'était angoissée parce que l'agresseur de sa fille n'avait pas été réincarcéré, alors qu'il n'avait pas respecté les règles de sa semi-liberté et qu'il avait ainsi pu s'en prendre violemment à elle et à Sandra.

Tandis que d'aucuns, rares, n'ont pas hésité à vanter cette choquante application de la loi à Cayenne, Ghislaine Stenger a déposé plainte contre X pour mise en danger de la vie d'autrui et déclaré avoir "renoncé à une partie de moi-même pour me consacrer à ma fille, elle est mon trésor, ma fille unique" (Le Parisien).

Quand l'effervescence médiatique a accompagné l'injustice exceptionnelle de Cayenne, qui, vraiment, suivra l'information ouverte à Bobigny chargée de faire la lumière sur ce constat : on n'a pas peur de libérer contre toute prudence sociale mais on répugne à remettre en prison par paresse, par inconséquence ou indifférence. On fait sortir de prison parce qu'on se sent bien indulgent et compréhensif mais on ne réincarcère pas parce qu'on est fatigué de tirer les conclusions de ses propres règles. On se préfère négligent que sévère.

Justice d'exception à Cayenne, justice ordinaire à Nanterre. Contraste entre une comparaison odieuse et de gravissimes offenses. Entre une atteinte raciste et des crimes, des corps, des sensibilités détruites.

Certes, on n'est plus sûr de rien. Lola a menti mais est déséquilibrée. L'ex-Femen n'a pas été tondue.

Mais Sofiane Rasmouk réincarcéré seulement le 12 août 2013, Priscilla et Sandra constituent, eux, un trio qu'on n'oubliera pas.

Parce que le premier doit beaucoup à la justice et que les secondes ne lui doivent rien.


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