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3 291 000 enfants pauvres en France !!! (450)

Droits des enfants - Jean-Pierre Rosenczveig, 12/02/2012

Le fait est implacable dans tous les sens du terme; pour autant il ne pas fait la une des journaux il n’est pas au cœur de la campagne électorale qui se déroule : la France comptait au 1er janvier 2010, au moins, … Continuer la lecture

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Le fait est implacable dans tous les sens du terme; pour autant il ne pas fait la une des journaux il n’est pas au cœur de la campagne électorale qui se déroule : la France comptait au 1er janvier 2010, au moins, 3 291 000 personnes de moins de 18 ans vivant sous le seuil des bas revenus déterminé par la branche famille de la sécurité sociale (1). Et nul doute qu’en 2011 la situation se soit encore détériorée. La fracture sociale s’accentue.

C’est la première fois que nous disposons de données chiffrées aussi élevées. Au début de la décennie on évaluait à 1 million les enfants pauvres de France selon les critères de l’INSEE ; à 2 millions selon les critères européens.

Chiffres officiels et repris comme tels par le gouvernement lui-même : « 7 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté, dont deux millions d’enfants « écrivait le premier ministre François Fillon dans la lettre de mission adressée le 9 juillet 2007 à Martin Hirsch appelé à exercer au sein du gouvernement la mission de Haut commissaire aux Solidarités actives contre la pauvreté.

L’objectif était fixé à l’orée du quinquennat : « Il en va de la pauvreté et des politiques sociales come des finances publiques ou de la sécurité. C’est en nous donnant des objectifs chiffrés et des obligations de résultat que nos nous mobiliserons suffisamment pour réduire la pauvreté, garantir l’égalité des chances, mettre nos politiques publiques au service de la dignité de tous. C’est pourquoi nous pensons que l’objectif de réduire d’au moins un tiers en cinq ans la pauvreté dans notre pays doit être l’objectif du gouvernement. … (…) » Le chef de l’Etat avait énoncé au début de son quinquennat que chacun serait jugé sur ses résultats.

Force est de constater que sur ce terrain quand le gouvernement s’était assigné un objectif de moins 30 %, il débouche à mi parcours sur un résultat de plus 30%. On sera d’ici deux ou trois ans ce qu’aura été le quinquennat, mais il ne faut pas être un grand pronostiqueur pour penser que l’objectif 2007 n’aura pas été atteint, loin de là, sur un sujet majeur et révélateur d’une politique ! On peut rechercher toutes les explications possibles et bien évidemment avancer « la crise » pour justifier cette singulière aggravation, il n’empêche qu’elle s’est déroulée devant nos yeux et continue à se dérouler ans que cela n’émeuve véritablement.

L’étude « Vivre la pauvreté quand on est un enfant » est riche d’enseignements tant par ses données qui tentent de faire comprendre qui sont les enfants concernés que par l’analyse de leur attitude face à la pauvreté.

Quelques remarques déjà sur les chiffres sachant que pour la CNAF le seuil de pauvreté est à 942 euros par mois et par unité de consommation (2).

Quoique déjà plus élevés que ceux dont nous disposions jusqu’ici, ils souffrent d’une évidente sous-évaluation. En l’espèce les fichiers des caisses d’allocations familiales et de la mutualité agricole ont parlé. Or un tiers des enfants uniques ainsi que nombre d’enfants de familles en grande précarité ne sont pas allocataires. Ajoutons, détail qui passe souvent inaperçu que l’étude concerne la seule France métropolitaine. En d‘autres termes, le chiffre réel doit être proche de 3,5 millions sinon le dépasser. Sachant que la France compte 13,5 millions d’enfants on mesure que la 5° puissance économique mondiale travers de sérieuses difficultés pour offrir un revenu décent à au minimum un quart de ses enfants (3).

Il va de soi que certaines régions ou certains départements sont plus durement frappés que d’autres. Ainsi PACA est à 29% avec de villes comme Marseille à 44% et Avignon à 45% ! On ne s’étonnera pas que je relève que la Seine Saint-Denis est à 37% quand les Yvelines le sont à 13%. Toujours la faute à ces maudits mauvais vents qui en région parisienne poussent les pauvres à l’est. Aucune une politique volontariste d’aménagement du territoire ou de solidarité entre collectivités ne sera parvenue à combattre cette donnée qui date de la deuxième vague d’industrialisation!

 Les enfants affectés par la pauvreté vivent le plus souvent dans des foyers monoparentaux (4) à plusieurs – 22% sont dans des familles avec 3 enfants - et ont souvent des parents issus de l’immigration non européenne. Les enfants les plus exposés sont les 3-5 ans. Sans surprise l’absence d’activité des parents explique souvent le niveau de revenus.

Où est la poule, où est l’œuf ? : nombre des jeunes enfants pauvres ne bénéficient pas d’un accueil spécialisés pour la petite enfance – 4% des enfants pauvres vont en crèche pour 16% des enfants de familles riches - avec tout ce que peut procurer au quotidien mais encore pour la socialisation et le développement ce type d’accueil. Pour Etienne Pinte, président du Conseil national des politiques de luttes contre la pauvreté et l’exclusion sociale «il manquerait 350 à 450 000 places pour que les enfants des familles des pauvres soient accueillis en structures collectives ». Chiffres à mettre en parallèle avec les efforts déployés de ces dernières années pour créer quelques 100 000 places d’accueil et le renoncement de François Hollande à son projet initial de créer 150 000 places ! De ce point de vue la situation n’est pas prête de s’améliorer.

Combien de femmes ne peuvent pas accéder qu’à un travail partiel et dans des conditions souvent époques pour les enfants qui restent seuls à la maison … quand maison il y a. Je rappellerai ici que pour la fondation Abbé Pierre (5), 600 000 enfants vivent le mal-logement dont 200 000 dans un meublé ou dans un appartement occupé sans titre, 52000 chez des tiers, en centres d’hébergement ou à l’hôtel, 21 000 dans un camping ou un mobil home (6) quand 21000 sont sans domicile fixe ou ont un habitat de fortune (cabine, cave, garage, voiture…).

 L’autre apport de l’étude est qualitatif : les sociologues se sont attachés à la perception que les enfants pauvres avaient de leur sort.

Leurs conclusions méritent d’être décodées à plusieurs degrés. Ils relèvent que ces enfants « manifestent une bonne dose d’optimisme et beaucoup d’énergie « dixit les ASH. Sans doute faute d’éléments de comparaison, ils ne vitupérèrent pas contre leurs conditions de vie ; et ce d’autant moins qu’il y a une présence parentale chaleureuse. Selon les chercheurs « les enfants sont entourés de personnes qui vivent la même situation qu’eux, ce qui leur donne à penser que celle-ci est normale » (sic).

Bien évidemment avec l’adolescence leurs yeux s’ouvrent par-delà leur environnement, mais là encore pour les sociologues le fait que ces jeunes n’aient « jamais qualifiés leur situation en termes d’injustice peut etre vu comme un signe d’absence de lecture collective de la réalité sociale de leur environnement ». Pas de mise en cause des parents ; pas de rancœurs contre quiconque. Le plus grave est ailleurs : ils paraissent avoir du mal à imaginer un avenir différent : « La panne de l’ascenseur social semble suffisamment intégré dans les milieux modestes pour que l’avancée en âge s’accompagne d’un rétrécissement des perspectives avancées par les enfants« . Faute de référence proche ils n’imaginent pas de vivre autrement.

 Conclusion malheureusement réaliste ces enfants sont frappés d’une double peine : un présent difficile et pas d’avenir ! Mais les nantis peuvent dormir tranquilles, sauf à avoir mauvaise conscience ! La révolte des enfants pauvres ne semble pas être pour demain.

Cette étude devra être présente dans le débat quand dans quelques jours tel ou tel candidat entonnera de nouveau l'hymne à la responsabilité parentale pour fustiger les enfants dangereux du fait de leur delinquance. Tous les enfants pauvres ne tombent pas dans la delinquance, tous les parents vivant en situation précaires ne demissionnent pas pour autant, et quand des enfants  succombent à la tentation d 'une delinquance d'appropriation on peut entendre, sans l'accepter, que certains aient le sentiment que "la loi " n'est pas juste.

Notes

(1) in ASH du 10 février 2012

(2) 24% déjà pour le CERC conseil de l’emploi, des revenus et de la cohésion sociale (CERC) dans son rapport de 2004 sur les enfants pauvres (3)

L’INSEE n’adopte pas le même mode de calcul du seuil de pauvreté mais débouche sur un résultat sensiblement équivalent puisque pour 2009 elle le fixe à 954 euros mensuels par unité de consommation

(4) On parle souvent abusivement de famille monoparentale : le foyer avec la présence d’un seul parent est monoparental, mais la famille est généralement composée de deux parents. L’enjeu est de mobiliser, dans tous les sens du terme et déjà financièrement, le parent absent du foyer. Or nombre de femmes qui élèvent seules les enfants le négligent et ne mobilisent pas les CAF pour leur venir en aide

 (5) Toujours In ASH du 10 février 2012 (6) Dans ce contexte et en période électorale on aura relevé que Jean-Louis Léonard, député UMP de Charente-Maritime, qui visait à interdire la présence à l’année sur des campings, fort intelligemment conseillé, a du en rabattre


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