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La droite voudrait bien mais ne peut pas !

Justice au Singulier - philippe.bilger, 1/07/2018

Il ne suffit pas d'accabler la droite classique comme si de gaîté de coeur et d'esprit elle s'abandonnait à une stérilité coupable. Car sa bonne volonté est indéniable. Pour la première fois elle regarde la politique comme si celle-ci était une inconnue. Elle n'a pas d'autre choix que de remplacer son logiciel ancien par une grille renouvelée. Sinon je crains que le constat à venir demeure vrai. Elle voudrait bien mais elle ne peut pas.

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Superbe cérémonie et magnifique discours pour célébrer l'entrée au Panthéon de Simone Veil et de son époux Antoine (France 2).

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J'ai scrupule à me projeter dans la quotidienneté de la politique après ces moments extra-ordinaires mais il me semble que ces consensus, s'ils permettent à la France d'honorer, ne donnent malheureusement aucune clé pour l'invention de l'avenir et l'affrontement d'un monde qui se soucie peu de la mémoire mais se collète comme il peut avec les tragédies, les misères et les difficultés d'aujourd'hui. Ils seront impuissants face aux populismes dont le président de la République a allusivement et une nouvelle fois dénoncé la montée.

En ce sens on a le droit de s'interroger sur cette quasi-impossibilité, pour l'instant, des Républicains à élaborer un programme qui ait une identité propre et parvienne à s'imprimer dans l'esprit public.

Un projet dont on distinguerait la particularité et l'autonomie par rapport à l'habile et apparente globalité "macroniste" et qui parviendrait à offrir aux citoyens l'espérance d'un autre chemin.

On ne cesse de réclamer à Laurent Wauquiez (par exemple Bruno Retailleau) l'obligation, avant les jeux de pouvoir et les hégémonies personnelles, d'élaborer une pensée politique et des mesures opératoires.

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Si Laurent Wauquiez se félicite de la concordance des vues - on n'est pas rentré dans les détails - à l'issue du conseil national sur l'Europe, il peine en revanche à convaincre quand il s'agit d'emplir l'espace que, selon lui, Emmanuel Macron souhaiterait vide entre LREM et les extrêmes, LFI ou le RN. Le diagnostic est pertinent mais demeure une difficulté qui aujourd'hui paraît insurmontable (Le Parisien, JDD).

Sur aucun plan LR ne réussit à construire dans le paysage politique une force, un élan, un ensemble de propositions qui manifesteraient qu'une droite authentique est véritablement de retour.

Mais peut-être faut-il moins incriminer l'impuissance de ce parti que la comprendre et la mesurer. Cette droite qui ne se trouve pas est aussi une droite qui ne sait plus où chercher, où se chercher.

Entre le président de la République qui occupe un vaste terrain d'un côté et de l'autre la faiblesse conceptuelle et d'imagination de LR, la tâche n'est pas aisée qui n'autorise plus, comme à une certaine époque où le simplisme avait ses chances, un radotage permanent sur des principes et des poncifs étiquetés naturellement de droite.

La complexité du monde, la lecture de plus en plus difficile d'une société diverse et volatile, l'appréhension sans cesse plus délicate des attentes et des désirs citoyens, la prise en charge de contradictions interdisant le sommaire dans les solutions rendent même plus qu'éprouvante, presque désespérée, dans notre démocratie la découverte d'une substance, d'une fraîcheur nouvelles pour une droite qui s'obstine à se percevoir immuable.

Pour n'évoquer que les problématiques qui semblaient relever d'elle, la justice, la sécurité, l'autorité et l'école, elle n'y attache pas l'importance créatrice, mêlant, pour aller vite, humanisme et efficacité, qui serait susceptible de la constituer comme exemplaire pour demain. Il y a évidemment l'inlassable Eric Ciotti mais qui à force, seul et répétitif, finit par ne plus surprendre.

Il y a également des thématiques, notamment dans les registres judiciaire - pénitentiaire surtout - et culturel où la droite s'est toujours contentée de s'abriter frileusement, bêtement sous la prétendue supériorité de la gauche qui l'a gangrenée en profondeur.

Ne conviendrait-il pas qu'avant même de se donner enfin une identité adaptée à son essence et à aujourd'hui, elle se débarrasse de celle qu'on lui a apposée et qui, telle une tunique de Nessus, lui colle à la peau et amplifie sa dépendance ?

Il ne suffit pas d'accabler la droite classique comme si de gaîté de coeur et d'esprit elle s'abandonnait à une stérilité coupable. Car sa bonne volonté est indéniable. Pour la première fois elle regarde la politique comme si celle-ci était une inconnue. Elle n'a pas d'autre choix que de remplacer son logiciel ancien par une grille renouvelée. Sinon je crains que le constat à venir demeure vrai.

Elle voudrait bien mais elle ne peut pas.


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