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Alors, on ne peut plus commenter les décisions de justice ?

Actualités du droit - Gilles Devers, 21/03/2013

Le Professeur de Droit Valls des Blancos, ci-devant Sinistre de...

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Le Professeur de Droit Valls des Blancos, ci-devant Sinistre de l’Intérieur, a expliqué qu’il sortait de sa mission en commentant l’arrêt Baby Loup, mais que bref, il en avait trop gros sur le cœur… Bichette… Cet adage « on ne commente pas une décision de justice » est rien de moins que débile.

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Si on ne peut plus commenter les décisions de justice, il va falloir proscrire les revues juridiques, toutes centrées sur le commentaire de la jurisprudence, et à la fac, les cours vont devenir une partie de cache-cache : les profs citeront les décisions de justice, mais ne pourront pas en dire un mot. Je ne parle pas du plan social qui attend les assistants de travaux dirigés dont le job est  d’apprendre aux étudiants cet exercice difficile qu’est le commentaire d’arrêt.

C’est idiot… et bien petit. C’est se montrer contaminé par la morale de l’asservissement. La liberté d’expression qui s’arrêterait devant l’énoncé d’un verdict…

... et un peu de droit

Ce qui est prohibé, c’est le discrédit. Ça change tout, c’est prévu par l’article 434-25 du Code pénal.

« Le fait de chercher à jeter le discrédit, publiquement par actes, paroles, écrits ou images de toute nature, sur un acte ou une décision juridictionnelle, dans des conditions de nature à porter atteinte à l'autorité de la justice ou à son indépendance est puni de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende.

« Les dispositions de l'alinéa précédent ne s'appliquent pas aux commentaires techniques ni aux actes, paroles, écrits ou images de toute nature tendant à la réformation, la cassation ou la révision d'une décision ».

Commençons par le 2° alinéa, le plus simple : tout ce qui est du registre du commentaire technique ou de l’acte judicaire est libre, sous réserve de la responsabilité disciplinaire des auteurs.

Ensuite, l’essentiel. La loi poursuit le fait de rechercher le discrédit sur une décision de justice « dans des conditions de nature à porter atteinte à l'autorité de la justice ». Pour référence, on peut citer un arrêt de la Cour de cassation du 15 mai 1961, sanctionnant l’auteur d’un texte qui « par delà le magistrat mis en cause, avait voulu atteindre la justice comme institution fondamentale de l’Etat, dans son autorité ou dans son indépendance » (Même solution : 11 mars 1997, N° 96-82.283).

Si les magistrats sont seuls en cause, ils peuvent agir via les infractions de diffamation ou injure envers les fonctionnaires publics, ou d'outrage envers un magistrat.9782361260576.jpg

Les poursuites pour discrédit sont rares, mais sous Sarko, ses sbires s’étaient plusieurs fois lâchés contre des décisions, au point de porter atteinte à l’autorité de la justice (Bobigny, Grenoble…).

Un régime spécial pour les ministres ?

Rien. C’est le droit commun, à ceci près qu’un ministre est le chef de son administration, et qu’il doit faire preuve d’élévation de la pensée lorsqu’il s’exprime.

Petit exemple. Bambi a expliqué après le conseil des sinistres qu’elle ne commentait pas la décision de la Cour de cassation,… mais qu’il  faudrait voter une loi pour imposer le contraire de ce qu’a jugé la Cour. Ca ressemble beaucoup à un commentaire d’hypocrite, ma Bambi chérie.

On commente pour dire quoi ?

Le Professeur de Droit Valls des Blancos dit qu’il n’est pas d’accord, certes, mais à quel titre ? Car il y a deux registres distincts, et il ne faudrait pas en faire un fromage unique.

La Cour de cassation étant gardienne du droit, la critique revient à dire que la Cour n’a pas appliqué le droit. Ah ça, c’est intéressant,… mais il faut argumenter, car le droit ce sont des textes et de la jurisprudence, et il faut donc dire quels textes et quelles jurisprudences. Cela aurait été l’occasion pour le Professeur de Droit Valls des Blancos de nous expliciter les sources de droit qui fondent sa fumeuse théorie sur les sphères publiques et les sphères privées, une perspective distrayante.

L’autre hypothèse est qu’il ne critique pas en droit, mais qu'il aurait voulu une autre solution, et donc une décision reposant sur une violation du droit. Ben oui, c’est l’un ou l’autre.

Alors, que faire ? Changer la loi, comme des Sarkos de base ? Ils peuvent, ils ont une majorité. Mais la Cour de cassation a pris soin de viser la Convention européenne des droits de l’homme et la directive de 2000 sur les discriminations, deux normes que la loi doit respecter. Et comme ils parlent de généraliser la loi de 2004, je rappelle que le Comité des Droits de l’Homme de l'ONU a condamné la France pour le vote de cette loi, et lui demande de prendre les mesures la rectifier.

Comme quoi, il faut encourager au commentaire d’arrêt, qui n’est pas un bavardage impénitent et aide à voir plus clair. 

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