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Transparence des frais des députés : il est temps d’agir, pas de promettre !

Regards Citoyens - njoyard, 23/05/2017

Patrimoine, intérêts, collaborateurs ou réserve parlementaire : depuis 2012, les parlementaires sont assujettis à de plus en plus de transparence ou de contrôles. Mais il reste un domaine des plus opaques : leurs frais de mandat. Tous les mois, chaque député reçoit une Indemnité Représentative de Frais de Mandat (IRFM), qui en 2017 s’élève à 5 372,80 € […]

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obtenons la transparence de l'IRFM

Patrimoine, intérêts, collaborateurs ou réserve parlementaire : depuis 2012, les parlementaires sont assujettis à de plus en plus de transparence ou de contrôles. Mais il reste un domaine des plus opaques : leurs frais de mandat.

Tous les mois, chaque député reçoit une Indemnité Représentative de Frais de Mandat (IRFM), qui en 2017 s’élève à 5 372,80 € nets. Elle vise à couvrir les « diverses dépenses liées à l’exercice de leur mandat qui ne sont pas directement prises en charge ou remboursées par l’Assemblée ». Alors que tout salarié ou fonctionnaire doit fournir des justificatifs pour chaque demande de remboursement, et que tous les chefs d’entreprises tiennent la comptabilité de leurs dépenses, les députés peuvent disposer de ce forfait librement.

S’il est parfaitement légitime que les parlementaires puissent disposer d’un budget pour réaliser leurs missions et relayer les préoccupations des citoyens au parlement, l’absence de transparence et de contrôle choque. Par le passé, plusieurs abus ont été constatés sur l’utilisation de l’IRFM : à des fins personnelles (vacances en famille, matériel de piscine ou abonnements télévisuels…), d’enrichissement (achat de biens immobiliers) ou pour financer des campagnes électorales. Le réglement de l’Assemblée nationale a depuis évolué afin de fixer des règles plus strictes. Cependant, un contrôle efficace en interne et la transparence pour le public restent inexistants et les sanctions se retrouvent ainsi quasi-inapplicables.

Aidez-nous à faire parvenir une demande à chaque député !

Las des promesses non tenues et des créations de groupes de travail sans conséquence, et alarmés par l’idée totalement contreproductive d’une simple fiscalisation de l’IRFM promise par l’exécutif fraîchement élu, nous initions aujourd’hui une action citoyenne collaborative visant à obtenir enfin cette transparence.

Comme le prévoit l’article 15 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : « La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration ». Ainsi, tout citoyen a le droit de connaître l’usage des deniers publics. Comme les députés ne sont pas tenus de maintenir une comptabilité stricte, il semble compliqué de leur demander des factures ou des preuves de l’utilisation de cet argent. En revanche, l’IRFM leur étant versée sur un compte dédié, celui-ci relève intégralement de l’utilisation de fonds publics et ne fait à ce titre pas l’objet du secret bancaire. Nous demandons ainsi à chaque député de nous communiquer les relevés de leur compte bancaire consacré à l’IRFM entre décembre 2016 et mai 2017, ainsi que la déclaration attestant sur l’honneur du bon usage de l’IRFM que chacun a fait parvenir au Bureau de l’Assemblée en début d’année. En cas de refus, nous sommes prêts à saisir les juridictions nationales et européennes pour obtenir cette légitime transparence.

Formulée dans un premier temps par e-mail la semaine passée, notre demande est probablement encore passée inaperçue auprès de nombreux députés, en campagne, ou déjà loin de l’Assemblée. Nous inscrivant dans une démarche juridique, il est important de nous assurer que chaque député a bien reçu notre demande. Nous les relançons donc à présent par courrier recommandé avec accusé de réception. Comme nous l’avons fait à plusieurs reprises, nous souhaitons impliquer les citoyens souhaitant contribuer à assurer la transparence sur cette indemnité : n’ayant que quelques milliers d’euros de budget annuel, nous proposons à tout citoyen de nous aider dans ce processus en envoyant ces courriers recommandés au nom de l’association. Nous ouvrons une plateforme permettant de prendre en charge et suivre l’avancement des demandes, et de distinguer les députés volontaires et ceux qui s’opposent à la transparence démocratique.

Plusieurs députés (Isabelle Attard, députée non inscrite, Regis Juanico, député du Parti Socialiste, Dominique Nachury, députée Les Républicains, Dominique Raimbourg, président de la commission des lois et député du Parti Socialiste) ont déjà exprimé leur intention de répondre favorablement à notre demande. Nous les remercions pour ce beau geste démocratique. Nous espérons que leur initiative pourra convaincre davantage de leurs collègues, y compris ceux candidats au renouvellement de leur mandat. En période électorale, jouer le jeu de la transparence peut s’avérer périlleux, les adversaires électoraux pouvant aisément monter en épingle une mauvaise interprétation de certaines informations. En l’absence de mécanisme de contrôle sur ces dépenses, les députés sortants attaqués n’auraient alors pas vraiment l’occasion de se défendre. Pour éviter que les choix en faveur de la transparence démocratique se transforment en punition électorale, nous avons ainsi pris la décision de ne publier les relevés obtenus qu’après la fin des élections législatives, c’est-à-dire à partir de la fin du mois de juin.

Aidez-nous à obtenir la transparence des frais de mandat en envoyant des demandes aux députés !

Après la demande, les suites juridiques

Pour les parlementaires qui refuseraient de nous communiquer les documents demandés, nous avons prévu de remonter progressivement les échelons juridiques, s’il le faut jusqu’au niveau européen.

Nous souhaitons en effet faire valoir notre droit de citoyen à accéder aux informations publiques, et plus particulièrement les informations relatives aux dépenses publiques. Ce droit est notamment garanti par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, par nos principes constitutionnels et européens, et par nos lois nationales. Le premier échelon est celui d’une demande à la Commission d’Accès aux Documents Administratifs (CADA) suite au refus ou à l’absence de réponse d’un député. La suite de la procédure est décrite plus en détail sur le site de l’opération.

procédure juridique de libération de l'IRFM

Projet de loi de moralisation : attention aux fausses solutions !

Le projet de loi de moralisation de la vie politique voulu par le Président Emmanuel Macron est semble-t-il sur les rails. Les débats médiatiques et parlementaires autour de ce projet seront l’occasion pour toutes les associations attachées à la transparence et à la lutte contre la corruption de faire valoir leurs arguments.

Au cours de l’élection présidentielle, Emmanuel Macron s’est engagé à fiscaliser l’IRFM et obliger les parlementaires à justifier ces frais en fournissant des factures. Si nous pensons que la justification des dépenses est indispensable, les deux mesures nous semblent contradictoires. Comme le député René Dosière, spécialiste des dépenses publiques, nous pensons que la fiscalisation des frais de mandat est une fausse solution. La fiscalisation est contreproductive, car elle assimile de fait l’IRFM à un revenu complémentaire. On ne peut annoncer dans le même temps que l’IRFM est une rémunération personnelle (en la fiscalisant) et un budget de fonctionnement (en justifiant l’usage de chaque euro dépensé). Si la disposition était étendue aux maires français, cela reviendrait à les imposer sur le budget de leur mairie, une aberration…

L’enjeu de la moralisation de la vie publique est de rétablir la confiance : se contenter de fiscaliser tout en promettant le contrôle ne lèvera jamais les soupçons. Seule la transparence de ces dépenses permettra de rétablir une confiance aujourd’hui si nécessaire !


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