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L’influence de la loi du 14 juin 2013 sur la rédaction du certificat de travail à compter du 1er juin 2014

K.Pratique | Chroniques juridiques du cabinet KGA Avocats - Stéphane Bloch, Fabien Crosnier, 16/07/2014

La loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi substitue une portabilité légale des garanties frais de santé et prévoyance au mécanisme de portabilité issu de l’ANI du 11 janvier 2008, et met en place de nouvelles obligations d’information à la charge de l’employeur dans le certificat de travail.
1. La portabilité des droits est devenue une pièce incontournable de l’arsenal législatif et conventionnel destiné à sécuriser et encourager les transitions professionnelles. Il en est ainsi, notamment, en matière de protection complémentaire d’entreprise, où l’inventivité des partenaires sociaux a précédé l’intervention du législateur. En effet, la portabilité des garanties frais de santé et prévoyance en cas de rupture du contrat de travail plonge ses racines dans l’accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché du travail, étendu par arrêté du 23 juillet 2008, aux termes duquel les partenaires sociaux ont institué un dispositif de maintien des garanties frais de santé et prévoyance en cas de rupture du contrat de travail ouvrant droit à une indemnisation par l’assurance-chômage (ANI du 23 juil. 2008, art. 14).

2. Par un avenant du 18 mai 2009, les partenaires sociaux ont mis à la charge de l’employeur une obligation d’information, en lui imposant de remettre au salarié la notice d’information fournie par l’organisme assureur et sur laquelle doivent figurer les conditions d’application de la portabilité. La Cour de Cassation a jugé par un arrêt du 20 novembre 2013 que la violation par l’employeur de cette obligation d’information sur la portabilité ouvre droit à indemnisation au profit du salarié (Cass. soc., 20 nov. 2013, n° 12-21.999, inédit).

3. La loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi a donné un fondement légal au dispositif de portabilité en prévoyant, aux termes de l’article L.911-8 du Code de la Sécurité Sociale, le maintien gratuit des garanties frais de santé (c’est-à-dire des risques maladie, accident et maternité) et prévoyance (incapacité, invalidité, décès), sauf faute lourde du salarié, pendant une durée égale à la période de chômage indemnisé et dans la limite de la durée du dernier contrat de travail sans pouvoir excéder douze mois. Le nouveau dispositif légal innove à plusieurs égards par rapport au mécanisme conventionnel issu de l’ANI de 2008 :
- la durée maximale de maintien des garanties frais de santé et prévoyance est portée à douze mois contre neuf auparavant sous l’empire de l’ANI du 11 janvier 2008 ;
- le législateur a prévu que le salarié bénéficierait du maintien des garanties à titre gratuit, alors que les partenaires sociaux, dans l’ANI de 2008, avaient prévu que le maintien des garanties serait financé soit par l’ancien employeur et par l’ancien salarié conjointement dans les conditions applicables aux salariés de l’entreprise, soit par un système conventionnel de mutualisation ;
- comme le dispositif de portabilité a désormais un fondement légal, il bénéficie même aux salariés des professions qui étaient précédemment exclues du mécanisme conventionnel, puisque l’ANI de 2008 n’avait pas été élargi mais simplement étendu (professions libérales et agricoles, secteur de l’économie sociale et solidaire, presse, enseignement privé, VRP) ;
C’est au salarié qu’il incombe de justifier auprès de l’organisme assureur, à l’ouverture et pendant la période de maintien des garanties, de ce qu’il remplit les conditions requises pour bénéficier de la portabilité (CSS, art. L.911-8, 5°).

4. L’article L.911-8, 6° du Code de la Sécurité Sociale, dans sa version issue de la loi du 14 juin 2013, met à la charge de l'employeur l’obligation de signaler le maintien de ces garanties dans le certificat de travail et d’informer l'organisme assureur de la cessation du contrat de travail ouvrant droit au maintien des garanties. L’ensemble de ces dispositions (portabilité légale et obligation d’information) s’applique à compter du 1er juin 2014 pour les garanties frais de santé, et à compter du 1er juin 2015 pour les garanties prévoyance. Par transposition de la jurisprudence relative à l’application dans le temps de l’ANI de 2008, il y a lieu de prendre en considération la date de notification du licenciement (Cass. soc., 23 mai 2012, n° 11-17.549 : Bull. civ. V, n° 158).

Toutefois, certaines entreprises peuvent vouloir avancer au 1er juin 2014 l’applicabilité de la portabilité des garanties de prévoyance, et ce afin d’éviter la coexistence, entre le 1er juin 2014 et le 1er juin 2015, du dispositif légal (pour les garanties frais de santé) et du dispositif conventionnel issu de l’ANI du 11 janvier 2008 (pour les garanties prévoyance).

5. En fin de compte, alors que jusqu’à présent l’employeur informait le salarié du maintien temporaire de ses garanties dans la lettre de licenciement, le législateur lui impose désormais de le faire dans le certificat de travail. Bien évidemment, l’employeur peut également signaler le maintien des garanties dans la lettre de licenciement. Depuis le 1er juin 2014, les entreprises dans lesquelles un régime de protection complémentaire a été mis en place doivent donc veiller à signaler dans le corps du certificat de travail délivré au salarié le maintien des garanties frais de santé. A compter du 1er juin 2015, elles devront également veiller à indiquer dans le certificat de travail le maintien des garanties de prévoyance.

6. Tout manquement à ces obligations d’information pourrait exposer l’employeur, si le risque se réalise pendant la période de maintien des garanties, à être condamné à verser au salarié les prestations auxquelles ce dernier aurait eu droit s’il avait été convenablement informé du maintien temporaire de ses droits et s’il avait par conséquent été à même d’effectuer les démarches nécessaires auprès de l’organisme assureur pour bénéficier de la portabilité.


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