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Qui est l'ennemi ? Le pouvoir ou le coronavirus ?

Justice au Singulier - philippe.bilger, 29/04/2020

Quand il est impossible de demeurer dans la politique partisane, serait-il inconcevable pour ceux qui ne gouvernent pas, ou pas encore, de l'admettre et d'user d'un autre ton ? L'ennemi est le coronavirus. Suis-je naïf en rappelant cette évidence ?

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Bien sûr, je ne comprends rien à rien. Tous les gens qui savent vont me rire au nez, à l'esprit. Comment peut-on être si naïf dans un monde qui se vante d'être si réaliste, et parfois jusqu'au cynisme qu'on n'est pas loin de présenter comme une qualité de l'extrême intelligence qui serait habile et dupe de rien...

Pourtant je persiste et déplore que le dialogue démocratique ne l'emporte jamais sur les antagonismes partisans comme si, avant toute chose, il convenait de montrer ostensiblement qu'on n'écoutera pas l'autre, parce que de lui ne pourrait surgir que du mauvais.

Dans une période ordinaire, dans des temps plus tranquilles, cette sorte de guerre civile constituant le camp en charge du pouvoir comme un ennemi à abattre est déjà aux antipodes de dispositions humaines que par ailleurs on célèbre pour se faire élire. Mais qu'on écartera aussitôt dans le vif de l'action ou par exemple dans la fournaise de la bataille parlementaire.

Cette dérive est encore plus aberrante quand nous sommes contraints de nous situer dans un monde à part, celui d'un fléau tellement inédit et menaçant. Cet adversaire commun devrait imposer à l'ensemble de la communauté nationale, citoyens et élus, une solidarité sans faille, une adhésion forte, un soutien à ce qui est proposé même imparfaitement.

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A entendre l'opposition s'exprimer après le discours du Premier ministre, j'ai eu l'impression qu'elle accusait le gouvernement non pas de combattre l'épidémie mais presque de l'avoir inventée (France 2).

Elle aurait souhaité, par un étrange paradoxe, à la fois un déconfinement plus libéral et une vigilance plus précautionneuse alors que le Premier ministre s'est engagé dans une voie qu'on pourrait qualifier de confinement adouci, avec quelques dates fondamentales : 7 mai, 11 mai et 2 juin.

A l'écoute de ces aigreurs systématiques, on est inéluctablement conduit, pour la gestion de la crise elle-même, à s'interroger : "Qui aurait fait mieux ?".

Même si le camp adverse est persuadé qu'il a le droit de blâmer l'exercice estimable du Premier ministre, encore aurait-il fallu qu'il le fasse sans cette hostilité, cette partialité, cette démolition univoque qui ne laissent même pas apparaître un consensus républicain sur le fait que le mal nous concerne tous et que personne n'en est responsable, si ce n'est la Chine.

Le climat d'aujourd'hui est insupportable. Il ne s'agit pas d'aspirer à une union nationale bêtifiante mais de prendre acte que, face à un pire absolument inédit et aux effets dévastateurs et durables, la critique est aisée mais la réponse sanitaire, sociale et économique difficile.

Quand il est impossible de demeurer dans la politique partisane, serait-il inconcevable pour ceux qui ne gouvernent pas, ou pas encore, de l'admettre et d'user d'un autre ton ?

L'ennemi est le coronavirus. Suis-je naïf en rappelant cette évidence ?


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