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La protection du droit d’auteur contraire à la liberté d’expression ?

K.Pratique | Chroniques juridiques du cabinet KGA Avocats - Karine Riahi, 27/01/2012

Le 24 janvier 2012, le FBI a fermé le site de Megaupload et les sites associés. Quelques jours auparavant, après le blackout du 18 janvier de Wikipedia, Wordpress, Reddit, Mozilla, Boing Boing, Failblog, les projets américains SOPA et PIPA, qui visent à préserver le droit d’auteur, ont été suspendus. Ils étaient pourtant promus par de fortes actions de lobbying des acteurs de l’industrie cinématographique et musicale. Le retrait de ces projets, dont nous rappellerons les grands lignes, a été salué par leurs opposants au motif qu’ils étaient un frein à la liberté d’expression. Doit-on en déduire que la protection du droit d’auteur est contradictoire avec la liberté d’expression ? Il semblait plutôt que la création et le droit de jouir de cette création était précisément la traduction de la liberté d’expression.
Le Stop Online Piracy Act (SOPA) habilitait les ayants-droit à lutter contre la violation des droits d’auteur on line, en :
- (i) donnant le pouvoir au procureur général de demander une ordonnance judiciaire contre un site internet américain si celui-ci commet ou facilite le piratage,
- (ii) permettant à un ayant-droit d’agir contre un site, en écrivant au site puis en intentant une action judiciaire,
- (iii) obligeant les fournisseurs d’accès à internet, moteurs de recherche, réseaux de paiement, services de publicité en ligne et registres de nom de domaine à empêcher leur utilisateur d’avoir accès à un site de contrefaçon,
- (iv) permettant à de telles entités d’arrêter ou de refuser leurs services à certains sites qui mettent ne danger la santé publique en distribuant des ordonnances de médicaments falsifiés
- (v) augmentant les peines pour certaines infractions au secret commercial et d’autres délits contre la propriété intellectuelle,
- (vi) prévoyant des pénalités comme la suspension des revenus publicitaires et des transactions en provenance de services comme paypal, l’interruption du référencement sur les moteurs de recherche, et le blocage de l’accès au site
- (vii) faisant du streaming d’un contenu protégé un délit, (
- (viii) indiquant qu’un seul lien ou contenu hors la loi suffit à engager des poursuites et sanctions.

Le Protect IP Act (PIPA), quant à lui, souvent considéré comme une version allégée de SOPA, avait pour objectif de donner au gouvernement américain et aux ayants droits des outils pour limiter l’accès à des sites web « scélérat » qui destinés à la contrefaçon, spécialement ceux qui sont établis à l’étranger.

La quadrature du net, a soutenu le blackout du 18 janvier en affichant sur sa page ce message d’un cynisme absolu « que ces initiatives sont une tentative globaliséer de censure d’internet au nom du droit d’auteur. Elle porteront inévitablement atteinte à la liberté d’expression, à la protection de la vie privée, à l’innovation et à la libre concurrence sur internet ».

C’est précisément sur ce point que le raisonnement s’avère contestable. Comment est il possible que ceux qui violent le droit d’auteur, notion érigée au rang de droits de l’homme par les esprits éclairés de la révolution française, peuvent ils en toute bonne foi prétendre que ce droit porte atteinte à la liberté d’expression ? C’est au contraire, les auteurs, qui en créant des œuvres dont ils choisissent l’exploitation de leur œuvre, qui exercent la liberté d’expression.

Si l’on peut admettre qu’il est difficile pour ces grands acteurs du net tels que Google, Wikipedia, Mozilla, de passer du régime favorable de l’hébergeur à celui de responsable des contenus postés, y compris pénalement ; tous devraient entreprendre une réflexion commune avec les acteurs de ces industries pillées, et non par lobbys interposés, pour aboutir à une solution qui conviennent vraiment à tous.

Cette solution exclurait ainsi définitivement ces sites construits et développés sur la contrefaçon et les atteintes aux droits des auteurs et ayants droits comme les Megaupload et dérivés, car on ne peut définitivement pas admettre que ces sites puissent se réclamer de « la liberté d’expression, du respect la vie privée, de l’innovation et de la libre concurrence sur internet ».



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