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Une préhistoire d'amour

Justice au Singulier - philippe.bilger, 13/02/2015

Les préhistoires d'amour sont belles parce qu'elles s'inventent contre, parfois, la rudesse du présent.

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Avec le procès du Carlton et DSK en vedette, si j'ose dire, durant trois jours, le film "50 Shades of Grey", les multiples articles et analyses sur la prostitution, le libertinage, la domination masculine, la misère sexuelle, le trouble et l'équivoque des contraintes acceptées et des libertés assujetties, on n'a jamais plus parlé de l'intime, des rapports de force, de la sexualité extrême, du sexe festif, du sexe triste que durant ces derniers jours.

Comme si une infinie curiosité, jamais lassée, pour ces territoires sombres, éclatants de l'instinct, du désir et du plaisir, avait enfin le droit de se manifester avec bonne conscience.

Comme si on découvrait que l'inventivité humaine était sans limites, et les appétences, et les goûts. Que des étrangers surgissaient en des personnalités qu'on croyait connaître de toute éternité. Que les spontanéités débridées , paraît-il "d'une bande de copains", imposaient une organisation impeccable. Que le libertinage était un divertissement trop sérieux pour être confié à des amateurs.

J'avoue que, malgré la qualité des compte rendus judiciaires, je me suis moins intéressé peu à peu aux débats de Lille, sans doute quand j'ai senti le basculement des chroniqueurs du côté de la relaxe de DSK, considérée comme inéluctable. En effet, on a eu de plus en plus droit à des conclusions qui s'ajoutaient aux constats. Et je n'apprécie, comme lecteur, que ceux-ci.

Mais si vraiment DSK a adopté la même argumentation et défense devant les magistrats instructeurs que lors des audiences, sans les blâmer n'ont-ils pas été trop concentrés sur des éléments psychologiques et sexuels dont peut-être ils ont surestimé le caractère décisif pour pouvoir le renvoyer du chef de proxénétisme aggravé contrairement aux réquisitions du parquet ?

Reste que même s'ils risquent un désaveu en ce qui concerne DSK, ils auront permis qu'au sujet de ce dernier s'instaure un débat né d'une contradiction acceptable et pour une bonne administration de la justice.

Pourtant, sur le thème largement entendu de la virilité, comme j'étais sensible à ces questionnements que tant de témoignages suscitaient, à ces explications apparemment hautaines et lassées que DSK dispensait, comme il m'aurait plu de pouvoir m'aventurer encore plus profondément dans le mystère humain !

Comme si nous étions tous concernés par ce glauque et ce qu'il y avait de structurel et d'universel dans ces débauches conjoncturelles.

Pourquoi, chez moi, cette détestation de la virilité chez les femmes avec, en revanche, une attirance pour ce qu'une légère féminité apportait aux masculinités même les plus assurées ?

Ce sont des interrogations dont on a à trouver les réponses tout seul. Il y a des rébus de l'être qui, je l'espère, au fil du temps, ne sont pas insolubles.

Au fond, toute cette période n'a pas été très propice au romantisme, à l'expression du sentiment amoureux, au culte du singulier dans le domaine du corps. On en a sans doute besoin comme d'une sorte de pureté qui viendrait apporter sa part à un monde qui la laisserait volontiers à sa porte !

Le hasard fait bien les choses.

On a découvert dans une sépulture remontant à 6000 ans dans le Péloponnèse un couple enlacé (lefigaro.fr).

Avec lui, tout est possible.

Il y a de l'amour, de la tendresse, peut-être du fantasme, "une excitation par l'imaginaire" (Figaro Vox), du singulier, des gestes doux, une approche délicate, l'éternité en un trait de temps, en ce moment magique où le couple s'enlace.

Plus rien ne compte que lui.

Les préhistoires d'amour sont belles parce qu'elles s'inventent contre, parfois, la rudesse du présent.


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