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Il faut sauver mon kiosquier

Justice au singulier - philippe.bilger, 6/02/2013

Il faut sauver mon kiosquier. Pas un de plus dans la longue liste des blessés de l'impérialisme syndical !

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La presse écrite est en crise, c'est connu.

Les kiosques ne sont plus fréquentés parce qu'on lit de moins en moins les journaux puisqu'internet, croit-on, donne réponse à tout.

Les kiosquiers se plaignent et ils ont raison.

Pourtant, Presstalis a procédé encore une fois à un blocage de la distribution, que les éditeurs ont dénoncé. Comme toujours.

Les quotidiens nationaux payants ne sont pas parus. Ainsi en a décidé le syndicat SGLCE CGT.

Quel étrange pays où, pour s'élever contre les licenciements, des droits sociaux sont accordés qui, exploités sans vergogne, peuvent causer des préjudices graves à une infinité de gens qui n'en peuvent mais !

Je n'évoque même pas le désarroi du citoyen pour qui le monde ne commence vraiment à exister, et la société à être, qu'à partir du moment où l'un et l'autre sont écrits puis lus. Un univers sans journaux, c'est un bout de bonheur et de démocratie qui s'en va.

Chaque fin de semaine, je vais acheter ma pâture médiatique, boulevard Bonne-Nouvelle, auprès d'un kiosquier qui habituellement est épanoui, joyeux, cordial, empli de la joie d'exercer ce métier qui lui convient à merveille tant lui-même est doué pour entretenir des relations avec autrui, ses clients qui sont devenus presque des amis.

Le 2 février, à ma grande surprise, je l'ai trouvé triste, abattu. Je l'ai questionné et il m'a avoué qu'il n'en pouvait plus. Sa mine sombre ne me rassurait pas.

Il m'a raconté son existence à Paris et ses extrêmes difficultés.

Depuis six mois, à cause de la crise, son chiffre d'affaires est considérablement affecté. A partir du 15 décembre, la distribution irrégulière, volontairement dévastatrice, des quotidiens nationaux et du Canard enchaîné a dégradé encore davantage sa situation. Il en est au point de vouloir se trouver un autre emploi à Paris ou à l'étranger.

De nationalité libanaise, il est marié et a deux enfants de 5 et 2 ans. Il ne parvient plus à régler son loyer de 1250 euros. Il a la chance d'avoir un bailleur compréhensif.

Titulaire d'une carte de séjour de dix ans, il a la possibilité de demeurer en France jusqu'en 2020 mais il est clair que c'en est bientôt fini pour lui du métier de kiosquier et de l'animation que lui-même, par sa présence et sa gentillesse, apportait à son environnement.

Ainsi ce citoyen exemplaire, dont la France n'avait qu'à se louer, est mis en danger dans ses conditions familiales et professionnelles parce que, de manière inconséquente, Presstalis oublie qu'à côté de ses droits, elle a aussi un devoir de responsabilité et de sauvegarde. Pas seulement pour se défendre, elle, mais pour éviter que les autres, notamment les kiosquiers, ne sombrent.

Quand mon kiosquier ne sera plus là, il manquera, il me manquera.

Quelle drôle de société qui décourage les meilleurs parce qu'une minorité de grévistes dispose d'une arme absolue de blocage. Ils se servent à cette fin de ce que leur permet notre démocratie, que par ailleurs ils offensent en la privant de ce qui est le signe le plus éclatant de sa respiration : la presse.

Il faut sauver mon kiosquier.

Pas un de plus dans la longue liste des blessés de l'impérialisme syndical !


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