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La baguette siamoise : pas de marque pour l’aspect du produit

Le petit Musée des Marques - Frédéric Glaize, 30/01/2014

La Sarmentine est une baguette à quatre croutons, pour laquelle les Grands Moulins de Paris a cherché à obtenir une protection via la marque figurative ci-dessus. Son dépôt, effectué en avril 2007, vise les produits suivants en classe 30 : « Farine et préparations faites de céréales ; pains ; pâtisserie ; levure et poudre pour faire lever ; biscuiterie ; gâteau ; biscottes. » Le 26 octobre 2012 (un peu plus de cinq ans après le dépôt), le Directeur de l’INPI émet une décision rejetant la demande de marque pour les préparations faites de céréales et le pain. La marque est alors enregistrée pour les autres produits revendiqués. Suite à un recours du déposant, la Cour d’Appel de Paris entérine la position de l’Institut, par un arrêt rendu le 25 septembre 2013 : le signe déposé ne peut pas constituer une marque valable pour du pain ou des préparations faites de céréales.  La tendance au refus de protection des marques portant sur l’aspect des produits n’est pas nouvelle, mais la façon dont elle est justifiée mérite de s’attarder sur certains aspects de la motivation de cet arrêt. La Cour examine si cette marque peut exercer la fonction essentielle d’indication d’origine et...

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marque française n°3496720

La Sarmentine est une baguette à quatre croutons, pour laquelle les Grands Moulins de Paris a cherché à obtenir une protection via la marque figurative ci-dessus.

Son dépôt, effectué en avril 2007, vise les produits suivants en classe 30 :

« Farine et préparations faites de céréales ; pains ; pâtisserie ; levure et poudre pour faire lever ; biscuiterie ; gâteau ; biscottes. »

Le 26 octobre 2012 (un peu plus de cinq ans après le dépôt), le Directeur de l’INPI émet une décision rejetant la demande de marque pour les préparations faites de céréales et le pain. La marque est alors enregistrée pour les autres produits revendiqués.

Suite à un recours du déposant, la Cour d’Appel de Paris entérine la position de l’Institut, par un arrêt rendu le 25 septembre 2013 : le signe déposé ne peut pas constituer une marque valable pour du pain ou des préparations faites de céréales.  La tendance au refus de protection des marques portant sur l’aspect des produits n’est pas nouvelle, mais la façon dont elle est justifiée mérite de s’attarder sur certains aspects de la motivation de cet arrêt.

La Cour examine si cette marque peut exercer la fonction essentielle d’indication d’origine et ne se trouve de ce fait pas dépourvue de caractère distinctif, se référant longuement aux articles 2 et à l’article 3, § 1er, b) de la Directive (CE) n° 2008/95 pour justifier la pertinence de sa démarche. En revanche, on ne trouve pas dans cet arrêt de référence explicite au critère habituellement mis en œuvre au niveau communautaire pour apprécier le caractère distinctif des marques tridimensionnelles, à savoir un divergence significative par rapport à la norme et aux habitudes du secteurs (CJUE 29 avril 2004, Henkel / OHMI C456/01 P et C-457/01 P, §39).  La formulation de ce critère communautaire est un autre problème (le fait d’ériger l’aspect de certains produits à ce statut de « norme » d’un secteur mériterait à mon humble avis d’être étayé par celui qui l’invoque et non pas simplement assimilé à un « fait notoire », notion quasi magique qui renverse la charge de la preuve).

Cependant dans le cas présent, en pratique la Cour se détermine au regard de l’aspect d’autres pains présents sur le marché.

Elle énonce en effet que :

le signe litigieux est constitué de la représentation figurative d’une baguette de pain reconnaissable à sa forme allongée ; Considérant que la présence de plusieurs extrémités n’est pas en elle-même nouvelle et originale (sic) dans la mesure où il existe sur le marché divers types de baguettes de pain comportant plusieurs extrémités, telles les baguettes épis (‘banette meule de pierre’, ‘fleur de sésame’) ; qu’ainsi la baguette représentée n’est qu’une variante de ce type de pain sans que le consommateur moyennement attentif puisse percevoir de façon immédiate et certaine les produits du requérant de ceux ayant une autre origine commerciale ;

Banette meule de pierre

Ici, l’aspect des produits cités, n’est pas explicitement considéré comme constituant des normes ou habitudes du secteur (selon le critère communautaire qui aurait du être appliqué), puisqu’ils ne le sont qu’à titre d’exemples. Mais il est intéressant d’aller voir à quoi ils ressemblent pour essayer de saisir concrètement ce qui a pu influencer les juges parisiens.

Baguette fleur de sésame

Les pains auxquels la Cour fait référence sont ceux des sociétés Banette et Festivals des Pains (photos à droite et à gauche). Là encore, notre esprit critique est avivé : alors que la Sarmentine des Grands Moulins de Paris comporte des croutons surnuméraires, on voit donc que les pains visés dans l’arrêt sont quant à eux caractérisés par la multiplicité d’épis. Ce n’est pas tout à fait la même chose.

Pour continuer à apprécier la diversité de l’offre en boulangerie, le site du Painrisien est une référence. D’autres décisions relatives à la validité de marques portant sur l’aspect de préparations alimentaires concernent par exemple les classiques lapins en chocolat, des chocolats en forme de sarments de vignes, un cercle de crevettes, ou encore des saucisses en forme de bretzels

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