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Le président du Crif est quelqu'un de bien !

Justice au Singulier - philippe.bilger, 23/02/2015

Pas de plus éclatant démenti à ce reproche, qui n'est pas nouveau, que la sincérité salubre d'un président du CRIF n'acceptant pas d'occulter la réalité des êtres pour s'abandonner à cette triste dérive : si ce n'est toi, c'est donc ton père... Parce que Roger Cukierman est quelqu'un de bien.

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Ce n'est pas parce qu'on est président du Conseil Représentatif des Institutions Juives de France (CRIF) qu'on est forcément, es-qualités, un homme honorable et juste. Pour toutes les élections, c'est pareil : le processus dégage une majorité mais pas nécessairement une moralité.

Je n'aimais pas, par exemple, les prises de position de Richard Prasquier mais son successeur Roger Cukierman est quelqu'un de bien, pour le dire familièrement.

Ce n'est pas d'aujourd'hui que j'ai cette appréciation favorable sur lui mais un propos récent qu'il a tenu n'a fait qu'amplifier mon estime.

Interviewé le 23 février sur Europe 1, à l'occasion du 30ème dîner du CRIF conviant 700 invités dont des personnalités politiques de tous bords, Roger Cukierman a déclaré que "...derrière Marine Le Pen qui est irréprochable personnellement, il y a tous les négationnistes, tous les vichystes, tous les pétainistes et donc pour nous, le Front national est une parti à éviter..."

Si, sur le FN, sa perception est tranchée et mêle, dans un opprobre global, le bon grain et l'ivraie, les nostalgiques du pire et des citoyens que seuls le présent et Marine Le Pen mobilisent, il convient de saluer sa parfaite honnêteté intellectuelle à l'égard de cette dernière puisqu'il a eu le courage de la qualifier "d'irréprochable". Ce n'est pas un mince compliment émanant de sa part !

Cette objectivité ne serait pas de trop dans l'ensemble de la classe politique et notamment chez les socialistes. Les absurdes allégations d'un député alsacien puis d'un Cambadélis, reliant, contre l'évidence et à toute force, la profanation de Sarre-Union au FN sont la preuve que l'idéologie bête et intolérante frappe encore !

Il n'est pas excessif d'évoquer le courage de Roger Cukierman. Pour Marine Le Pen, la partialité est de mise et sa différence avec son père, sur le plan du racisme et de l'antisémitisme, généralement niée ou au moins négligée.

Pour s'en convaincre, il suffit de prendre acte de la réaction violente de Serge Klarsfeld qui a contredit le président du CRIF en soulignant : "Mme Le Pen n'a pas rompu avec son père. Elle dirige le FN qui porte le passif des prises de position antisémites du père qui est président d'honneur du Front national".

Si on suit l'argumentation de Serge Klarsfeld, Marine Le Pen est coincée à perpétuité dans la réputation de son père et dans l'étau d'un certain terreau discutable du FN, tout simplement parce qu'elle est la fille de Jean-Marie Le Pen et malgré son obstination éthique à se distinguer de lui.

Il y a quelque chose de profondément choquant dans cette position qui ne tient aucun compte des attitudes et des pensées personnelles et s'indigne de ce qui, au contraire, chez Roger Cukierman, manifeste une ouverture d'esprit et un souci de vérité.

Pour lui, le singulier n'est pas étouffé par le pluriel tandis que Serge Klarsfeld subordonne la nuance et la vérité à l'indignation collective et au procès par contagion et familiarité. Le singulier exact est dévoré par le pluriel diffus.

Je ne suis pas persuadé qu'au sein du CRIF, Roger Cukierman aura le soutien et l'approbation qu'il mérite. Il doit être défendu parce que sa parole ne concerne pas que les Juifs et elle me semble d'autant plus précieuse qu'aussi bien le FN que le Front de gauche dénoncent, dans ce dîner annuel, une "réunion communautariste".

Les représentants du Conseil Français du culte musulman ont décidé de boycotter ce dîner parce que Roger Cukierman a mis en cause, dans les violences actuelles contre les juifs, "une toute petite minorité de jeunes musulmans", précisant que l'immense majorité des musulmans en était d'ailleurs victime. Le président du Crif s'est expliqué et sur ce plan également, sauf à lui chercher des noises pour tout, je ne vois pas en quoi ses propos sont répréhensibles. Décrire une réalité en prenant la précaution de l'imputer à une minorité n'est pas stigmatiser mais dire ce qui est.

Pas de plus éclatant démenti à ce reproche de communautarisme, qui n'est pas nouveau, que la sincérité salubre d'un président du CRIF n'acceptant pas d'occulter la réalité des êtres pour s'abandonner à cette triste dérive : si ce n'est toi, c'est donc ton père...

Parce que Roger Cukierman est quelqu'un de bien.


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