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Emmanuel Macron a un gros point faible !

Justice au Singulier - philippe.bilger, 4/02/2020

Le président s'honorerait en corrigeant son énorme point faible et et en choisissant enfin des ministres qualifiés. Sinon la porte poussée lucidement par Xavier Bertrand s'ouvrira toute grande !

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On le sentait dès le début mais c'est de plus en plus tristement éclatant.

Il y avait d'emblée, dans la personnalité du président de la République, une tendance qui malgré les apparences l'éloignait du régalien qui exige plus de véritable autorité que de volonté de séduction, ce qui était son fort.

L'insécurité augmente, les délits de toutes sortes - agressions sexuelles, violences et vols notamment - et les crimes progressent. Dans les villes et également, ce qui est très révélateur, dans les campagnes, qui ne sont plus épargnées. La France n'est à l'abri nulle part. Cette perception renvoie à une dégradation collective incontestable, sans forcément avoir une incidence sur le sentiment de sa sûreté personnelle.

Le président de la République répugne à une politique de fermeté face aux transgressions qui affectent le commun des citoyens: cette préoccupation ne serait pas de son niveau et la lutte contre le terrorisme lui a fourni un prétexte pour justifier cette indifférence... De la même manière que les Gilets jaunes ont mobilisé trop longtemps une police qui aurait été plus utile et efficace ailleurs.

Emmanuel Macron demeure désespérément étranger aux soucis d'un pays qui a peur, parce qu'il a ce défaut, constaté à maintes reprises, d'être un piètre DRH de la société "France". Il a une incoercible propension à préférer, à la fiabilité, à l'efficacité et à la maîtrise professionnelles, le soutien de personnalités inconditionnelles et à la compétence relative. Il tombe ainsi, lui aussi, dans le péché français du pouvoir, qui est de choisir la complaisance plus que l'intelligence, l'obséquiosité plus que la loyauté.

Ainsi, si j'ai défendu Christophe Castaner - qui aurait fait mieux ? - quand après chaque samedi il était traîné dans la boue parce que des désordres, des dégradations et des violences avaient été commis par les black blocs et des Gilets jaunes y mettant aussi du leur, je ne pousserais pas l'apologie jusqu'à prétendre que le duo formé par la garde des Sceaux et le ministre de l'Intérieur est irréprochable et performant. Loin de là (voir mon billet du 22 janvier).

Il est étonnant que le président ait été rarement attaqué sur son point faible qui est, selon la formule euphémisée de Xavier Bertrand le premier à s'engouffrer aussi vigoureusement dans la brèche, d'être "mal à l'aise avec les questions régaliennes". Il inspire une politique aux antipodes de celle qui conviendrait, le tissu social étant déchiré aussi à cause de cette carence fondamentale. L'intellectuel de gauche, progressiste bien sûr, n'a pas totalement quitté l'être du président et il s'est réfugié dans son inaptitude à comprendre l'importance démocratique du régalien (JDD).

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Le RN, paradoxalement, n'est plus audible sur ce plan. A force de vitupérer tous les laxismes présidentiels, il est moins crédible face à celui d'aujourd'hui.

La droite, qui ne devrait pas se satisfaire d'être qualifiée et de se qualifier d'honorable pour se dispenser de penser, a trop tardé pour appréhender ce trou noir dans la vision d'Emmanuel Macron et proposer une alternative à la fois vigoureuse et humaine. Qui se traduirait d'abord par l'exigence, sur le plan pénal, d'une impunité zéro et d'un pouvoir qui pour tout et partout apporterait son aval aux ripostes à opposer aux délinquants et aux criminels. Au lieu de les approuver du bout des lèvres. Quand elles ne sont pas désavouées.

Il est navrant qu'on s'abandonne à une sophistication intellectuelle et politique pour la sécurité et la Justice alors que quelques orientations signifiantes seraient seulement nécessaires.

- Soutien systématique aux forces de l'ordre sauf quand ponctuellement tel ou tel gendarme ou policier aurait été convaincu d'avoir perpétré une infraction sans la moindre légitimité.

- Ne pas pleurer sur la surpopulation carcérale mais dans les plus brefs délais construire de nouvelles prisons.

- Dé-bureaucratiser la procédure pénale aussi bien pour les enquêtes que pour le Parquet et l'instruction.

- Exécuter les peines, quelle que soit leur nature. C'est le dysfonctionnement radical d'aujourd'hui.

- Instaurer un contrôle professionnel sur l'activité de l'ensemble des magistrats, à tous les niveaux, et élargir les conditions de leur responsabilité.

- Dissocier le grade et la fonction pour que des magistrats remarquables n'attendent pas d'être chenus pour prendre les postes occupés par des très imparfaits, voire des médiocres.

- Constituer le citoyen comme l'alpha et l'oméga de la finalité du service public de la Justice. Cesser de ressasser le poncif que la société devrait quelque chose à l'institution judiciaire alors que l'inverse est vrai. La mise en application de cette métamorphose constituerait, dans notre République, un changement bienvenu.

Le président s'honorerait en corrigeant son énorme point faible et et en choisissant enfin des ministres qualifiés.

Sinon la porte poussée lucidement par Xavier Bertrand s'ouvrira toute grande !


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