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De nouvelles garanties contre les changements de doctrine administrative

K.Pratique | Chroniques juridiques du cabinet KGA Avocats - Sophie borenstein, Bérengère Marlot, 2/10/2018

La loi dite « ESSOC » (n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un Etat au service d’une société de confiance) a pour ambition d’établir une relation de confiance entre l’administration fiscale et le contribuable. Pour y parvenir, les objectifs affichés sont la simplification des rapports entre l’administration et le contribuable et l’instauration d’une confiance réciproque. La loi prévoit notamment la réduction de l’intérêt de retard en cas de rectification spontanée d'une erreur de déclaration, l’élargissement de la procédure de régularisation spontanée à toutes les procédures de contrôle fiscal, des aménagements relatifs aux intérêts de retard et au droit à l’erreur en matière douanière. Outre ces diverses mesures, la loi renforce les garanties du contribuable face aux changements de doctrine administrative. Le « rescrit contrôle » tel qu’issu de la doctrine administrative est redéfini et légalisé (I) et une nouvelle « garantie fiscale » est créée (II).
I. La consécration du « rescrit contrôle »
Qu’est-ce qu’un « rescrit contrôle » ?


Il permet aux entreprises de solliciter, sous conditions, une prise de position formelle de l’administration au cours d’un examen ou d’une vérification de comptabilité, s’agissant de points examinés dans la cadre du contrôle mais qui n’ont pas entrainé de rectification. Les prix de transfert sont exclus.

Qui peut solliciter un tel rescrit ?

Auparavant le « rescrit contrôle » ne pouvait être sollicité que par une entreprise dans le cadre d’une vérification de comptabilité.

La loi « ESSOC » a étendu le champ d’application du « rescrit contrôle » à l’entreprise qui fait l’objet d’un examen à distance de comptabilités informatisées. Il s’applique également en matière de contributions indirectes au titre des contrôles et enquêtes diligentés par l’administration des douanes.

Quand le demander ?

A défaut de précision légale et sans modification de la doctrine administrative, les modalités de mise en œuvre du « rescrit contrôle » demeurent inchangées. La demande doit être formulée par écrit avant l’envoi de la proposition de rectification et au plus tard lors de la réunion de synthèse.

Comment faire une demande de « rescrit contrôle » ?


La demande de rescrit doit préciser expressément le ou les points sur lesquels la demande porte, la règle de droit appliquée et les éléments de fait ayant permis de conclure à cette solution. Elle ne peut être sollicitée que sur des points examinés lors de l’examen ou de la vérification de comptabilité et qui n’ont pas donné lieu à rectification.

En cas de demande imprécise, il peut être demandé au contribuable de compléter sa demande dans un délai de trente jours. Si la demande demeure incomplète, le vérificateur peut refuser de prendre une position formelle.

Pourquoi obtenir une prise de position formelle ?

La prise de position précise, ciblée et explicite garantit le contribuable contre les changements de doctrine. Aucune interprétation différente de celle de la position formelle ne pourra alors lui être opposée pour justifier un rehaussement, tant que la situation de fait, la législation ou la règlementation ou la doctrine administrative ne sont pas modifiées.

Quelle est l’entrée en vigueur du nouveau dispositif ?

Le nouveau « rescrit contrôle » au champ d’application étendu est applicable aux contrôles dont les avis sont adressés à compter du 11 août 2018 et aux enquêtes effectuées par l'administration à compter de cette même date.


II. L’institution d’une nouvelle « garantie fiscale » en l’absence de redressement
Qu’est-ce qu’une « garantie fiscale » ?

La « garantie fiscale » permet la validation par l’administration des points examinés lors d’un contrôle fiscal et qui n’ont fait l’objet d’aucun rehaussement. Jusqu’alors seules les prises de position formelles de l’administration pouvaient lui être opposées par le contribuable. L’absence de rectification devient désormais opposable à l’administration.

Qui peut en bénéficier ?

L’entreprise qui fait l’objet d’un examen ou d’une vérification de comptabilité ou le particulier soumis à un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle peut bénéficier de la garantie (article L 80 A alinéa 2 du LPF). Celle-ci s’applique également en matière de contributions indirectes pour les contrôles et enquêtes diligentés par l’administration des douanes. Cette garantie ne s’applique pas en revanche aux contrôles sur pièces.

Seul le contribuable de bonne foi peut bénéficier de cette garantie.

Comment en bénéficier ?


La garantie s’applique aux points du contrôle qui n’ont fait l’objet d’aucune rectification mais qui sont mentionnés sur la proposition de rectification ou sur l’avis d’absence de rectification comme ne comportant ni insuffisance, ni inexactitude, ni omission, ni dissimulation dans les éléments ayant servi de base au calcul des impôts. En pratique, le vérificateur, par une mention expresse, délimite le champ d’application de la garantie.

De facto la « garantie fiscale » nouvellement instituée n’emporte pas approbation tacite des points examinés et non rehaussés, mais constitue néanmoins une nouvelle garantie pour le contribuable de bonne foi qui pourra en bénéficier.

Pourquoi bénéficier d’une prise de position formelle ?


La prise de position de l’administration engage celle-ci à l’égard du contribuable. En pratique, celui-ci ne pourra plus faire l’objet d’un rehaussement sur le point de droit approuvé par l’administration.

Le contribuable bénéficie de cette garantie tant que ni sa situation, ni la législation, la jurisprudence ou la doctrine administrative n’auront été modifiées.

Une prise de position qui serait erronée vaut prescription anticipée à compter de la date de cette réponse et jusqu’à ce que le contribuable ait été officiellement avisé que la position antérieure comportait une erreur, et ce indifféremment de la nature de l’impôt concerné.

Quelle est l’entrée en vigueur de la « garantie fiscale » ?

Ces nouvelles dispositions seront applicables aux contrôles dont les avis sont adressés à compter du 1er janvier 2019 (et du 11 août 2018 en matière de contributions indirectes).




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