Actions sur le document

Municipales PS à Marseille: Vers le rejet des comptes de campagne

Actualités du droit - Gilles Devers, 10/09/2014

Le financement des campagnes électorales est très strictement encadré,...

Lire l'article...

Le financement des campagnes électorales est très strictement encadré, l’idée étant de plafonner les dépenses, et de prévoir un remboursement par l’Etat des candidats ayant respecté les règles. Toutes les opérations de la campagne, en recette et en dépense, sont regroupées dans un compte établie selon des règles très précises, et transmis à la Commission nationale des comptes de campagnes et des financements politiques (CNCCFP), qui procède à un examen de régularité et de sincérité. Si tout est oki, le remboursement s’opère, et à défaut ce sont les sanctions ; rejet du compte, refus du remboursement, et saisine du juge de l’élection, qui en fonction de la nature du motif du rejet, peut prononcer des sanctions d’inégibilité. Aucune modification ne peut être apportée au compte par le candidat après la date limite de dépôt du compte à la CNCCFP. Tous ceux qui ont tenté leurs chances à une élection depuis vingt ans connaissent parfaitement ces règles.

Que s’est-il passé à Marseille ?

48758.jpgDans un courrier adressé aux huit têtes de liste (PS / EELV), le rapporteur de la CNCCFP prévient qu’il proposera à la commission de rejeter leurs comptes.

L’établissement du compte de campagne est une responsabilité du candidat en tête de liste, soit pour Marseille sept PS et une EELV. Ils disposaient d’un délai jusqu’au dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin, soit le 30 mai pour déposer, chacun, le compte. Et cela a été fait. Tout le problème, et que le 10 juin, ont été adressés à la Commission de nouveaux comptes, expliquant que ceux donnés le 30 mai n’étaient pas fiables. Or, aucune modification ne peut-être apportée au compte du candidat après l'expiration du délai de dépôt du compte de campagne et le candidat doit assumer la responsabilité des données qu'il contient.

Ce travail d’établissement des comptes est une tâche d’un expert-comptable, et aussitôt David Ciot, premier secrétaire de la fédération PS des Bouches-du-Rhône, a choisi de s’essuyer les pieds sur l’expert-comptable : «D’après ce que j’ai compris, il y aurait eu une erreur du comptable dans le dépôt des comptes». Pas très convaincant.

Eugène Caselli, tête de liste dans le 2esecteur, explique : « L'expert-comptable a dit qu'il fallait signer ce second compte de campagne. La difficulté porte sur la répartition dans les huit comptes de dépenses destinées à la campagne générale, éléments sur lesquels nous n'avions aucune possibilité de contrôle. » Guère plus courageux, mais on progresse.

On s’approche du réel  avec Karim Zéribi, chef de file EELV dans le 5e secteur : « Le mandataire m'a dit qu'il allait intégrer des éléments qu'il n'avait pas au départ ».

Dans les dépenses de campagne pour une ville comme Marseille, on distingue celles qui sont engagées par chaque candidat dans son secteur, et celles qui relèvent de la campagne générale (documentation de tracts généraux, meeting communs, local de la campagne…), soit en l’occurrence 450 000 €, qui doivent être réparties dans chaque secteur. Un travail qui peut conduire à des arbitrages délicats. Des propos rapportés par Karim Zéribin, on comprend que, vu l’ambiance en cette fin de campagne, l’expert n’a pu obtenir les bonnes infos dans les bons délais. Il a donc déposé un compte un peu pifométrique pour respecter la date du 30 mai, avant de voir que les éléments reçus après cette date rendaient le compte du 30 mai non sincère.

Les sanctions22032011131735.jpg

Dans un cas comme dans l’autre – compte non sincère ou compte sincère mais tardif – la première sanction est le refus du remboursement. Mais la Commission doit aussi saisir le juge de l’élection, qui est pour les municipales le tribunal administratif.

Le tribunal administratif doit se prononcer sur l’analyse faite par la Commission, mais s’il reconnaît que celle-ci a statué à bon droit, il prononce le  rejet du compte. Adieu le remboursement par l’Etat, soit une somme de l’ordre de 500 000 € pour les joyeux camarades socialistes marseillais. Ambiance… Ensuite, la loi confie au juge d’apprécier « la volonté de fraude ou de manquement d'une particulière gravité aux règles relatives au financement des campagnes électorales ». S’il considère que le candidat n’a pas fraudé ou que son manquement n’est pas particulièrement grave et il ne prononce pas son inéligibilité. Dans le cas contraire, le candidat est déclaré inéligible et le cas échéant, démissionnaire d’office. Pour les scrutins de listes la sanction d’inéligibilité ne touche que la tête de liste.

Entre deux maux, l’expert-comptable a choisi le moindre, en pensant qu’on s’en tirerait toujours mieux avec un compte sincère. Il est bien difficile de soutenir qu’il a pu prendre une telle décision sans des discussions serrées avec les élus. Aussi, le juge pourrait considérer que seul doit être considéré le compte adressé le 30 mai, qui n'était pas sincère, soit un terrain plus favorable pour des sanctions...

Un joli cadeau pour Jean-Noël Guérini qui, hier, présentait une liste très offensive pour les sénatoriales.


Retrouvez l'article original ici...

Vous pouvez aussi voir...