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Que va devenir la marque Megaupload ?

Le petit Musée des Marques - Cédric Manara, 22/01/2012

Megaupload est mort. Et sa marque ? C’était un empire électronique. Il s’est effondré en quelques minutes quand le FBI a ordonné l’arrêt de ses serveurs et saisi ses noms de domaine. Il ne reste plus rien de la puissance de stockage (impressionnante) et de la bande passante sur lesquelles s’était construit Megaupload, et des méga-revenus accumulés par ses dirigeants. Il ne reste plus rien… sauf peut-être quelques marques ! La société Megamedia Ltd, de droit hong-kongais, avait déposé en 2009 aux États-Unis des marques correspondant à ses divers services : Megaupload, Megavideo, Megapay, Megabox… Oui, vous lisez bien : la société qui tirait principalement ses revenus de l’exploitation illégale de la propriété intellectuelle d’autrui en utilisait une (infime) partie pour s’offrir… des droits de propriété intellectuelle ! La lecture de certains des e-mails du dirigeant de Megaupload révélée par le désormais célèbre indictment rédigé contre lui montre d’ailleurs qu’il  devenait soucieux de la défense de son groupe. Ainsi, dans un mail d’octobre 2011, Kim Dotcom avertit l’un de ses partenaires commerciaux que ses avocats américains vont engager une action contre des concurrents dont il écrit : « they are damaging the image and the existence of the file hosting industry »...

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Megaupload est mort. Et sa marque ?

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C’était un empire électronique. Il s’est effondré en quelques minutes quand le FBI a ordonné l’arrêt de ses serveurs et saisi ses noms de domaine. Il ne reste plus rien de la puissance de stockage (impressionnante) et de la bande passante sur lesquelles s’était construit Megaupload, et des méga-revenus accumulés par ses dirigeants. Il ne reste plus rien… sauf peut-être quelques marques !

La société Megamedia Ltd, de droit hong-kongais, avait déposé en 2009 aux États-Unis des marques correspondant à ses divers services : Megaupload, Megavideo, Megapay, Megabox… Oui, vous lisez bien : la société qui tirait principalement ses revenus de l’exploitation illégale de la propriété intellectuelle d’autrui en utilisait une (infime) partie pour s’offrir… des droits de propriété intellectuelle !
La lecture de certains des e-mails du dirigeant de Megaupload révélée par le désormais célèbre indictment rédigé contre lui montre d’ailleurs qu’il  devenait soucieux de la défense de son groupe. Ainsi, dans un mail d’octobre 2011, Kim Dotcom avertit l’un de ses partenaires commerciaux que ses avocats américains vont engager une action contre des concurrents dont il écrit : « they are damaging the image and the existence of the file hosting industry » (p. 51). Cherchant à protéger son activité, on comprend que le dirigeant ait aussi souhaité protéger ses marques.

Et quelles marques ! Megaupload est une marque qui en quelques années est devenue mondialement connue, sans les efforts financiers habituellement associés à la construction d’une marque globale : dépôts multiples, investissements publicitaires, etc. Avec 50 millions de visiteurs par jour, ce qui fut l’un des premiers sites mondiaux a construit de manière sulfureuse une marque tellement renommée qu’elle pourrait sans doute être considérée comme notoire au sens de l’article 6bis de la Convention d’Union de Paris. Les dispositions de cet article prévoient en substance que, même en l’absence d’enregistrement, lorsqu’elle est très largement connue, une marque doit bénéficier d’une protection.

Une méga-marque …

Megaupload est mort, mais sa marque reste. Cela peut rappeler le trépas de Napster, dont le nom était si connu qu’il avait ensuite été utilisé pour désigner un magasin de musique en ligne. Ses actifs immatériels furent rachetés par une société qui adopta cette marque pour rebaptiser son service PressPlay.

Le service Megaupload ne vaut plus rien, mais la marque conserve sa valeur. Le FBI n’a pas choisi de saisir les marques de Megamedia, mais 18 noms de domaine (megastuff.co, megaworld.com, megaclicks.co, megastuff.info, megaclicks.org, megaworld.mobi, megastuff.org, megaclick.us, mageclick.com (sic), HDmegaporn.com, megavkdeo.com (sic), megaupload.com, megaupload.org, megarotic.com, megaclick.com, megavideo.com, megavideoclips.com, megaporn.com). L’objectif était moins ici de saisir des actifs de valeur que de mettre fin aux activités de la société. Ces noms n’en ont pas moins une certaine valeur en raison de la notoriété qui leur est associée. On pourrait imaginer qu’ils soient un jour vendus pour indemniser les victimes de Megaupload – et que le soient alors aussi les marques américaines.

De par le monde, d’autres noms de domaine de la galaxie Megaupload vont susciter l’intérêt s’ils expirent sans être renouvelés.* En France, par exemple, selon le whois le nom megaupload.fr a été enregistré par un particulier en mai 2011.** On peut imaginer aussi que des opportunistes enregistrent dans divers pays des marques déclinant l’identifiant MEGA, afin de recueillir les fruits de sa renommée !

… qui pourrait devenir res nullius

Si, dans le prolongement de l’indictment, devait un jour être prononcée la dissolution de la société Megamedia Ltd, immatriculée à Hong Kong, les marques déposées ou enregistrées à son nom (une bonne dizaine aux USA) n’auraient donc plus aucun titulaire. Elles se trouveraient alors à disposition du premier qui les déposera, puisque le droit de marque est un droit d’occupation.

En effet, dans cette hypothèse, les marques deviendraient juridiquement res nullius (chose sans maître ou chose sans propriétaire), un peu comme les abeilles sauvages, le gibier ou le contenu des poubelles. Ce cas de figure n’a rien d’une vue de l’esprit : le « recyclage » de marques constitue par exemple l’activité d’un « antiquaire » de marques.

CM (avec FG)

Notes :

* Dès le 19 janvier 2012, jour de l’arrêt de Megaupload, ont par exemple été enregistrés les noms alternativemegaupload.fr, films-megaupload.fr ou streaming-megavideo.fr

** Le contact technique indiqué est Megamedia Ltd. L’article 6.2 de la charte de nommage du .fr exige qu’une personne morale n’ayant pas d’adresse en France fasse valoir un droit sur une marque internationale afin d’enregistrer un nom en .fr.

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