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Enrichir NosDéputés.fr exige plus de transparence ! Compte-rendu de notre rencontre avec Alain Vidalies

Regards Citoyens - teymour, 10/09/2012

Alain Vidalies a eu, le samedi 25 août à l’université d’été de La Rochelle, de vifs propos sur les effets supposés de NosDéputés.fr sur le parlement. Suites aux réactions suscitées par cette prise de parole, son cabinet nous a convié pour échanger sur ces critiques. Lundi 3 septembre à 19h, nous étions donc 5 membres [...]

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Alain Vidalies a eu, le samedi 25 août à l’université d’été de La Rochelle, de vifs propos sur les effets supposés de NosDéputés.fr sur le parlement. Suites aux réactions suscitées par cette prise de parole, son cabinet nous a convié pour échanger sur ces critiques. Lundi 3 septembre à 19h, nous étions donc 5 membres de Regards Citoyens à l’hôtel de Clermont pour nous entretenir avec le Ministre, son directeur de cabinet (l’ancien député Jean Mallot) et son conseiller communication.

La presse régionale à l’origine du courroux du ministre

En début d’entretien, le Ministre, qui avait pris connaissance de notre analyse de ses propos, a tenu à nous indiquer qu’il ne pensait pas ses critiques influencées par ses nouvelles fonctions exécutives. Son principal reproche s’est articulé autour de l’utilisation des indicateurs de NosDéputés.fr par la Presse Quotidienne Régionale. Selon lui, les journaux régionaux procéderaient à de mauvais choix et en feraient un mauvais usage. Cela participerait, selon son ressenti, à la survalorisation du mandat de certains parlementaires au détriment des « vrais » actifs.

Nous nous sommes donc penchés ensemble sur la nature des différents indicateurs que nous avons retenus pour réaliser NosDéputés.fr. Alain Vidalies nous a reproché la mise à disposition sur un même pied d’égalité de critères reflétant des activités sans grand investissement, comme la signature d’amendements ou la rédaction de questions écrites, avec d’autres plus conséquentes comme l’écriture de rapports. Si nous nous retrouvons avec le ministre sur la difficile mise en comparaison de critères aussi divers, nous estimons que la crédibilité de notre site repose sur un traitement égal de tous les parlementaires, qu’ils soient de la majorité ou de l’opposition. Or, les parlementaires de la majorité se voient chargés de la grande majorité des rapports. De même, les membres de l’opposition déposent, notamment pour ralentir l’exécutif, beaucoup plus d’amendements que leurs collègues de la majorité, alors que ces derniers ont beaucoup plus de chances de voir les leurs adoptés. Choisir d’ignorer des indicateurs, sous prétexte qu’ils refléteraient un investissement moins important que d’autres, nous obligerait donc à favoriser un type de député par rapport à un autre.

Classer les parlementaires n’est pas le rôle de Regards Citoyens

Une autre solution discutée consisterait à recourir à la pondération et donc de proposer un palmarès des députés. Nous nous sommes toujours refusés à le faire. Nous proposons en effet, des données brutes unitaires et non un palmarès général, qui supposerait d’établir des coefficients pour mettre en comparaison les différents éléments et donc imposer notre vision de la vie parlementaire. Nous estimons que l’importance à accorder à chacun des indicateurs nécessite un parti pris éditorial ou militant qui ne nous incombe pas. De tels palmarès prêtent, de plus, le flanc à des critiques souvent légitimes et font oublier aux citoyens, par leur apparente simplicité, la complexité du travail parlementaire. Forcément imparfaite, une telle hiérarchisation ne saurait incomber à notre rôle de citoyens observateurs et médiateurs. Nous avons toujours préféré aider à l’émergence de multiples classements ou autres palmarès réalisés par des acteurs plus légitimes que nous, tels que les journalistes auxquels nous expliquons méticuleusement, dès qu’ils nous le demandent, la signification concrète de chacun de nos indicateurs.

Le ministre nous a ensuite répété sa conviction de l’impact supposé de NosDéputés.fr en commission, où les députés prendraient la parole de très nombreuses fois pour répéter des arguments déjà évoqués. Nous l’avons trouvé peu sensible aux arguments factuels que nous développions dans notre billet précédent, lequel démontrait pourtant que la session extraordinaire de juillet 2012 avait en réalité vu moins d’interventions en commission que lors des trois années précédentes.

Commissions, discussions générales : des reproches peu étayés

Refusant de nous indiquer des exemples de situations qui avaient pu le choquer, le ministre s’est contenté de reprendre le cas particulier d’une audition du ministre du redressement productif – racontée notamment par un collaborateur parlementaire sur un blog de l’Express – lors de laquelle de nombreux députés ont profité de leur rencontre avec le ministre pour faire remonter à l’exécutif les préoccupations de leurs circonscriptions. À défaut de pouvoir disposer de suffisamment d’exemples concrets illustrant l’hypothèse du ministre, il nous est malheureusement difficile d’identifier quelles améliorations pourraient répondre à cette critique.

Alain Vidalies est ensuite revenu, sur la question centrale à ses yeux des interventions en discussion générale : elles seraient selon lui le reflet d’une implication plus importante d’un député dans le débat parlementaire alors que celles sur le fond d’un texte seraient plus opportunistes. De par notre expérience dans les tribunes publiques de l’hémicycle, nous nous montrons peu convaincus par cette théorie : les discussions générales ne reflètent que rarement les débats au fond du texte, et la très faible présence des députés sur les bancs durant ces discours semble révélatrice du peu d’importance politique de ce type d’exercice.

Malgré notre a priori, nous avons tenu, après notre rendez-vous, à étudier par les données l’hypothèse du ministre. Nous avons compilé pour la précédente législature le décompte de tous les débats auxquels un député a participé en hémicycle à hauteur de plus de 100 mots et avons indiqué dans quels cas il était intervenu en discussion générale ou seulement lors des débats. Si la prise en compte des seules interventions en discussion générale aurait permis au député Vidalies d’améliorer très légèrement son indicateur d’interventions en hémicycle entre 2007 et 2012, elle l’aurait fait dans des proportions beaucoup plus importantes pour des parlementaires à l’investissement notoirement moindre. Ce nouveau calcul aurait en revanche dévalorisé de manière très significative des députés très investis dans les débats en hémicycle comme Jean-Marc Ayrault, Gilles Carrez, Marylise Lebranchu, Pierre Méhaignerie ou Patrick Roy.

Discussion générale
Les bancs de l’hémicycle durant une discussion générale
CC-BY-NC-SA Richard Ying

Une nécessaire amélioration de la transparence parlementaire

L’un des échanges les plus constructifs a porté sur la difficulté à refléter au mieux le travail relatif à l’écriture de certains rapports. Majoritairement confiés à des administrateurs de l’Assemblée pour leurs parties techniques, ces rapports nécessitent souvent de très nombreuses auditions par les parlementaires. Nous avons donc rappelé notre désir de voir rendus publics les calendriers des auditions liées à la rédaction d’un rapport, voire les agendas professionnels des députés. Nous pourrions ainsi rendre compte de l’implication physique, réellement mesurable, d’un parlementaire dans l’écriture d’un rapport. Le ministre a trouvé cette évolution intéressante tout en jugeant sa publication peu aisée.

L’aspect le plus positif de ce rendez-vous a porté sur les améliorations souhaitables en matière de transparence du parlement. En tant qu’anciens parlementaires, Alain Vidalies et Jean Mallot se sont exprimés tous deux en faveur de la publication précise des votes personnels, des délégations de vote, des sanctions financières et des archives du calendrier parlementaire. Ils partagent avec nous le constat que la revalorisation des activités parlementaires passe par une amélioration de la transparence. Alors que les votes individuels sur les amendements, rapports, projets ou propositions de loi sont des fonctions constitutionnelles essentielles du parlementaire, il est anormal qu’il soit impossible de savoir précisément qui de nos représentants a fait l’effort de se déplacer pour prendre part à la décision, ni comment ils ont voté individuellement.

Vers une ouverture plus large du dialogue

Sur le fond, il n’y a pas de remise en cause de la part du ministre de notre action, mais bien une volonté de rendre l’activité parlementaire accessible aux citoyens, par le biais de sites tels que les nôtres. Nous nous sommes quittés sans réelle perspective d’amélioration concrète à apporter à notre travail, faute d’éléments concrets appuyant les ressentis personnels, mais avec l’expression par le Ministre du souhait que tous les acteurs concernés (Assemblée, Sénat, exécutif, universitaires et citoyens) puissent échanger ensemble sur les voies d’amélioration du rendu de l’activité parlementaire. Le colloque que nous avons organisé en juillet dernier avec Sciences-Po avait permis d’initier ce type de discussion notamment avec le Sénat ou des représentants du Secrétariat Général du Gouvernement. Notre rencontre avec Alain Vidalies et ses équipes permettra peut-être de renouveler l’expérience en accueillant cette fois des représentants de l’Assemblée nationale et de l’exécutif. Cela suppose néanmoins que le dialogue se poursuive dans l’écoute et la prise en compte attentive des arguments exposés de part et d’autres, afin d’éviter que des comportements individuels soient érigés en généralités applicables à toute la classe politique.

En bonne intelligence et dans une perspective de dialogue prolongé nous avons permis aux équipes du ministre de lire ce texte préalablement à sa publication.


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