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La justice argentine va juger les crimes du franquisme

Actualités du droit - Gilles Devers, 20/09/2013

Ça se gâte : les droits de l’homme deviennent universels. Normalement,...

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Ça se gâte : les droits de l’homme deviennent universels. Normalement, les droits de l’homme, c’est pour les anciennes puissances coloniales qui font régner la justice à leur manière. Par exemple, la justice espagnole qui s’occupe des crimes de Videla et de Pinochet… mais qui refuse de se saisir des ceux du franquisme. Seulement, la roue tourne... et maintenant, voilà la justice argentine qui se charge de lutter contre cette impunité criante. Elle vient de demander l'arrêt de quatre anciens policiers espagnols accusés de tortures pendant le régime de Franco (1939-1977). Un très mauvais exemple,... qui pourrait de donner des idées à l’Algérie...

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Le problème de l’impunité est bien présent en Espagne. Les victimes espagnoles des crimes commis par le régime de Franco se comptent par milliers : disparitions, homicides, torture, enfants volés… Problème : toutes ces procédures sont bloquées du fait d’une loi d’amnistie de 1977. Les petits fachos de mirlitons s’étaient offert un préservatif judiciaire XXL. Cette amnistie n’a pas été remise en cause, malgré la loi du 20 novembre 2002 qui condamne le coup d’Etat du 18 juillet 1936 et engage un processus de réhabilitation des victimes.  

Le feu procédural a repris à l’initiative de trois exilés de la dictature franquiste, devenus argentins, qui ont déposé plainte devant les juridictions argentines. Après cette première plainte somme tout banale – un citoyen victime d’un crime commis à l’étranger par un étranger est recevable à agir devant les juridictions de son propre pays – on entre dans le plus inhabituel, avec l’application d’un régime de « juridiction universelle » : les crimes contre l'humanité peuvent être jugés en dehors de tout critère de rattachement, du seul fait de leur extrême gravité. Exactement ce qu’avait tenté la justice espagnole contre Pinochet, en fonction d’une législation de « juridiction universelle » depuis abrogée par l’Espagne.

Les régimes de compétence universelle sont rares et particulièrement complexes à mettre en oeuvre, du fait des incidences diplomatiques, mais ils tendent à s’affirmer comme un moyen effectif en cas de recours à la torture, du fait de la spécificité de crime. Aussi, nous verrons ce qu’il en sera de la force de ce régime en droit argentin.

Après trois ans d’instruction, la juge Maria Servini de Cubria a cerné ses travaux sur des faits de torture commis contre des militants arrêtés pour des activités politiques, et ce 18 septembre, elle a demandé aux autorités espagnoles l’extradition de Jesus Muñecas, ancien capitaine de la garde civile, Celso Galvan, ancien inspecteur de la brigade politico-sociale, José Ignacio Giralte, ancien commissaire de police et José Antonio Gonzalez Pacheco, alias Billy el Niño, ancien inspecteur. 

Maria Arcenegui, porte-parole de la plateforme de soutien à la plainte argentine contre les crimes franquistes (AQUA)  s’est réjoui de la décision du juge : « C'est une décision historique qui marque le début de la fin de l’impunité ». Et elle a annoncé de nouvelles plaintes.

C’est désormais au gouvernement de Mariano Rajoy de répondre à cette demande d’extradition. En cas de refus, un joli contentieux est à attendre, car la décision sera prise en Espagne et doit respecter les principes du droit européen, pour lequel la torture est un crime de jus cogens (TPIY, 10 December 1998, Furundzija CEDH, Soering 1989; Cruz Varas A991; Chahal 1996; Selmouni, 1999 ; Al-Adsani, 2001 ; Ould Dah, 2009).

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