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Ouvrez vos données bibliographiques, surtout si elles sont enrichies !

Paralipomènes - Michèle Battisti, 29/01/2013

Des notices bibliographiques publiques « laconiques », des notices de fournisseurs commerciaux onéreuses, pourquoi les bibliothèques ne se tourneraient-elles pas vers les offres gratuites et aux données plus riches proposées par des librairies ? C’est ce soulignait un article récent d’ActuaLitté. Mais que cautionneraient ainsi les bibliothèques afin de rendre leurs catalogues plus « sexys » ? Que propose [...]

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Des notices bibliographiques publiques « laconiques », des notices de fournisseurs commerciaux onéreuses, pourquoi les bibliothèques ne se tourneraient-elles pas vers les offres gratuites et aux données plus riches proposées par des librairies ? C’est ce soulignait un article récent d’ActuaLitté. Mais que cautionneraient ainsi les bibliothèques afin de rendre leurs catalogues plus « sexys » ? Que propose donc le catalogue de la bibliothèque de Clermont pour susciter une telle « volée de bois vert » ?

Se lier à des sites commerciaux  …

Le site propose le résumé de livres provenant de la base de données proposée par Dialogues, une  librairie d’une autre région, « ce qui oblige les bibliothécaires, dans une logique de données ouvertes (ne serait-ce pas plutôt en réponse à un contrat), à citer leurs sources ». Quoi de plus normal pourtant ! Mentionner les sources, cela s’impose en effet toujours, même dans le cadre d’une exception au droit d’auteur, même pour une œuvre « tombée » dans le domaine public. Reproduire ces résumés serait d’ailleurs franchement interdit faute d’un contrat ad hoc avec la librairie, a priori titulaire des droits sur les résumés [1].

On y trouve aussi les couvertures de livres, sous la forme d’une vignette, accompagnée du logo d’Amazon, car extraites de ce site, soit également accompagnées d’un lien entrant vers un autre site commercial, lien imposé contractuellement par Amazon et susceptible celui-ci d’aspirer des clients vers l’un de ces mastodontes du web volontiers tentés par un monopole.

… pour de bonnes raisons

L’argent épargné sert à acquérir d’autres ouvrages offerts à un public « qui, de toute manière, ne les auraient pas achetés ». Il sert aussi à financer une opération de numérisation  d’œuvres du domaine public et l’achat de lecteurs de livres électroniques. Numériser les couvertures, souligne-t-on aussi, est coûteux. Il faudrait en outre obtenir une autorisation au titre du droit d’auteur, ajouterai-je.

L’article parle d’Open data. Or, cette expression s’applique a priori plutôt à des données publiques alors que résumés et pages de couvertures sont proposés par des entreprises privées. Peu importe ! Les bibliothèques de Clermont soulignent qu’il n’y pas de contrat publicitaire. Certes, mais il s’agit bien d’un contrat  puisqu’en échange des résumés et des couvertures, un lien entrant vers les sites qui les ont proposés est obligatoire, tout comme la présence de logos, un point fort peu contraignant. La société Amazon, par ailleurs, aurait-elle négocié des droits de réutilisation des couvertures d’ouvrages auprès de tous les éditeurs qui y sont présents, pour tout type d’usage et dans le monde entier ? Au titre du Fair Use ? Je n’ose l’imaginer.

Couvertures, résumés, … Plutôt qu’un lien vers telle ou telle librairie, pourquoi ne pas utiliser les sites des éditeurs des ouvrages concernés, s’il acceptaient (enfin) d’autoriser gratuitement les bibliothèques ayant acheté l’une de leur publication de reproduire sur leur sites les 1ère et 4e pages de couverture ? Sponsoriser les librairies de sa région peut se faire en multipliant les actions menées localement. La cannibalisation des clients des librairies par les bibliothèques, lieu d’incitation à la lecture, n’a jamais été prouvée me semble-t-il.

Élargir les exceptions au droit d’auteur ? J’avais envisagé la question pour qu’au titre de la citation, à des fins d’information, la couverture puisse accompagner toute présentation ou critique de livres, pour des usages non commerciaux, soit également pour les bibliothèques [2]. N’est-ce pas ce qui se fait déjà sur les réseaux sociaux ? Un code de bonnes pratiques, pourquoi pas, car la mise en oeuvre d’une exception serait bien trop lourd. Faute d’une telle autorisation, pourquoi ne pas utiliser, en effet, le site d’Amazon, au lieu de faire un lien vers le site de l’éditeur de l’ouvrage (ce que j’ai tendance à préconiser) ? Si les bibliothèques publiques peuvent (pourraient) bénéficier de négociations collectives faites notamment par Couperin ou Carel, la tentation resterait forte pour toutes les autres bibliothèques.

Une telle exception pourrait couvrir aussi la 4ème de couverture. Pour d’autres résumés, on pourrait imaginer un wikipédia de résumés, ou mieux (m’a-t-on soufflé) un moteur permettant de retrouver ceux dont la réutilisation est libre, moyennant indication de l’auteur et du site source. Les résumés réalisés par des volontaires seraient mis à la disposition de tous sous une licence CC by-sa, celle de Wikipédia, autorisant la reproduction, la modification, l’usage à des fins commerciales ….  Bref prêts pour toute autre forme de valorisation.

Sources

Notes


[1] Aucune autorisation particulière, me semble-t-il, dans les mentions légales du site de la librairie Dialogues. Un contrat ad hoc entre les bibliothèques de Clermont et la librairie.?

[2] Je connais naturellement les arguments  donnés pour alléguer la protection des couvertures (voir E. Pierrat, p. 99 et 100 ; Droit d’auteur et de l’édition, Éditions du cercle de librairie, 2005). Oui, les couvertures sont protégées de toute contrefaçon faite par un autre éditeur ou auteur, mais on se trouve ici dans le champ de l’information. Voir (ce que je partage volontiers … ) les arguments de Cédric Manara dans Documentaliste-Sciences de l’information, 3, 2012 dans son article intitulé « Le droit de l’information : paradoxes et ouvertures ».


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