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M. Dieudonné M’Bala M’Bala relève aussi de la police administrative (550)

Planète Juridique - admin, 7/01/2014

La polémique suscitée par M. Dieudonné M’Bala M’Bala va bien au delà de sa personne et des propos condamnables qui constituent son fond de commerce actuel. Réussira-t-il à ouvrir une brèche dans les certitudes des partisans de la liberté et … Continuer la lecture

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avocats006(1)La polémique suscitée par M. Dieudonné M’Bala M’Bala va bien au delà de sa personne et des propos condamnables qui constituent son fond de commerce actuel. Réussira-t-il à ouvrir une brèche dans les certitudes des partisans de la liberté et des valeurs qu’il combat ? On est proches d'y succomber et de lui donner cette satisfaction.

La circulaire annoncée depuis quelques jours et prise hier par le ministre de l’intérieur suscite déjà le scepticisme : ne va-t-on pas faire de M. D. M’Bala M’Bala un martyr et en tous cas lui offrir le cadeau en or d’une publicité gracieuse ? L’argument ne tient pas. Ses propos relèvent des juridictions pénales : il a semble-t-il été condamné 7 fois. Chacun de ces procès peut être l’occasion s'il le veut d’une médiatisation et d’une description de son prétendu chemin de croix.

Plus grave la Ligue des droits de l’Homme, des juristes ayant un sens politique éminent comme Pierre Joxe ou encore des journalistes comme le directeur de Médiapart Edwy Plenel, condamnent cette circulaire Valls qui leur apparaît comme une régression pour les libertés publiques. Il faudrait attendre la commission d’infraction pour interdire un spectacle. Il faut laisser l’artiste créer et le sanctionner ensuite s’il dérape. C’est donc bien une censure d’Etat que le ministre l’intérieur dit de gauche développerait. La liberté d'expression serait bafouée.Face à Mme Filipetti, ministre de la culture, pugnace à l’extrême dans l’échange pour justifier l’opportunité de la démarche gouvernementale, Edwy Plenel n’hésita pas ce soir sur Canal + à accuser le ministre de l’intérieur d’avoir remonté depuis 3 semaines une machine contre Dieudonné M’Bala M’Bala a des fins politiques personnelles pour se dédouaner de sa posture réactionnaire. Pas moins !

Et si l’un et l’autre avaient raison, mais avaient oublié un argument essentiel dans le débat issu tout simplement de la leçon « Police administrative, police judiciaire » du cours de droit administratif dispensé en deuxième année de licence en droit dans toutes les bonnes facultés ?

La justice n’est pas que judiciaire avec des policiers constatent qui une infraction, le procureur de la République ou une victime qui poursuivent et le tribunal pénal qui condamne ; elle est aussi administrative. Un policier installé dans un carrefour peut relever les infractions commises  - c'est sa mission de police judiciaire –, mais il doit d’abord veiller à la bonne circulation – c'est sa mission de police administrative. On  oublie trop souvent cette double mission policière.

Déjà à Toulouse dans une intervention médiatisée restée en mémoire, M. Sarkozy alors ministre de l’intérieur - et ex-avocat- en fustigeant devant les caméras les policiers des mineurs qui jouaient au baby foot avec des jeunes en leur demandant de se concentrer sur leur vraie mission consistant à arrêter les délinquants niait à tort que l’enjeu policier soit d’abord, ne fut-ce que pour éviter des victimes, d’éviter de nouvelles infractions.

Quand les propos qui vont être tenus sur une scène  lors d’une réunion militante – je ne parle pas de spectacle car je crois affectivement qu’avec M. Dieudonné M’Bala M’Bala  on  est dans un registre autre que celui de l’art – sont connus d’avance, ont déjà été qualifiés de délictueux pour porter atteinte à des valeurs fondamentales de la République et quand ces propos sont susceptibles de provoquer des incidents, l’autorité administrative - le maire, le préfet - est en droit de prendre les dispositions pour éviter que la réunion prévue se tienne. Ne le ferait-elle pas qu’elle pourrait engager sa responsabilité. Il n’y a pas de censure à empêcher que des propos faisant l’apologie de l’antisémitisme ne se renouvèlent pas.

005.gifIl faut donc jouer  sur les deux registres dont nous dote notre droit : prévenir et réprimer. Non seulement il faut le poursuivre, mais demander et tenter d’obtenir des sanctions sévères et bien évidemment en poursuivre l’exécution malgré l’organisation par l‘intéressé de son   insolvabilité. Il faut le faire sans état d’âme. Et puis, lorsqu’on  estimera que les conditions posées par la loi et rappelées par la circulaire sont réunies, il faudra interdire purement et simplement ses prestations et laisser les juridictions administratives se prononcer. On n'est pas dans une atteinte à la liberté d'expression mai s dans la prévention de la réitération d'infractions ! Et pas n'importe lesquelles : négationnisme, injures, outrages, antisémitisme et racisme, etc..;

Certes cela ne suffira pas. Dans les moments difficiles que nous connaissons sur le plan économique et de doutes majeurs à l’égard de la société M. Dieudonné M’Bala M’Bala est porté par des vents favorables. Plus que jamais il va falloir rappeler l’histoire ; il va falloir tenter de s’attaquer au terreau de l’antisémitisme moderne qu’est l’affrontement israélo-palestinien. Oui il y a d'autres racismes que l'antisémitsme ds ce pays, mais cela ne justifie l'antisémitisme.  Il va encore falloir que par-delà leurs clivages superficiels, les républicains de tous bords s’allient sur l’essentiel pour réduite le nauséabond à l’espace réduit mais malheureusement irréductible dont il disposera toujours.

En  tous cas arrêtons de faire à ce Monsieur le plaisir de nous diviser et de nous livrer à des exploitations politiciennes de ce débat qui vaut mieux que cela.


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