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Conseil municipal : dans le cadre du débat public, les limites de l'injure sont spécifiques

droit des collectivités territoriales - actualités et miscellane - Luc BARTMANN, 19/03/2015

Lors d'un conseil municipal de Nicel le maire s'est adressé en ces termes à un conseiller d'opposition :

« S'il vous plaît, cela suffit ! Votre mauvaise éducation, votre indignité à exercer des mandats publics ... », et : « Vous quittez cet hémicycle si vous n'êtes pas digne d'y tenir la place qui est la vôtre ; je suis là pour faire respecter la police de séance, quand quelqu'un s'exprime, on l'écoute et on le respecte ; on vous a écouté beaucoup trop longtemps, mais on vous a écouté, ayez la correction d'écouter notre adjoint aux finances apporter des réponses, sinon ce n'est pas la peine d'intervenir et de poser de fausses questions », avant d'ajouter « c'est un comportement de voyou ».

Le conseiller concerné, considérant que les expressions : " votre mauvaise éducation, votre indignité à exercer des mandats publics ", et : " c'est un comportement de voyou ", étaient injurieuses à son égard, a fait citer le maire devant le tribunal correctionnel qui a déclaré celui-ci coupable. Les parties, ainsi que le ministère public, ayant relevé appel de cette décision la Cour d'appel d'Aix-en-Provence a infirmé le jugement, et a dit le délit d'injure non constitué à la charge du maire au motif que les expressions litigieuses, placées dans le contexte dans lequel elles ont été prononcées, renfermaient des imputations précises, de nature à faire l'objet d'un débat contradictoire et d'une preuve, et ne pouvaient être qualifiées d'injures, mais constituaient des diffamations.

Par un arrêt du 9 décembre 2014,  la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation a jugé ceci :

"Attendu que, si c'est à tort que la cour d'appel a retenu que les propos litigieux caractérisaient une diffamation, en l'absence d'imputation ou d'allégation de faits suffisamment précis, l'arrêt n'encourt pas pour autant la censure, dès lors que, ainsi que la Cour de cassation est en mesure de s'en assurer, les paroles injurieuses incriminées, prononcées, dans le contexte d'un débat politique, par le maire, chargé de la police de l'assemblée municipale, s'analysaient en une critique du comportement de l'un de ses membres dans l'exercice de son mandat public, et ne dépassaient pas les limites admissibles de la liberté d'expression, qui ne peut connaître d'ingérence ou de restriction, en une telle circonstance, que pour des motifs impérieux, dont l'existence n'est pas établie."

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