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Modification des seuils applicables aux contrats de la commande publique : tour d’horizon

K.Pratique | Chroniques juridiques du cabinet KGA Avocats - Marc Sénac de Monsembernard et Mathieu Prats-Denoix, 23/01/2012

Par un décret n°2011-2027 du 29 décembre 2011, le pouvoir réglementaire a modifié les seuils applicables aux contrats de la commande publique. Ces nouveaux seuils sont entrés en vigueur le 1er janvier 2012.
Tous les deux ans, les seuils correspondant à la valeur des marchés à partir desquels ces derniers sont soumis à l’Accord sur les marchés publics figurant à l’Accord instituant l’organisation mondiale du commerce, lequel résulte de l’Acte final des négociations du cycle de l’Uruguay signé à Marrakech en 1994, sont révisés.

Afin de se conformer aux obligations prévues par l’Accord sur les marchés publics et par soucis de cohérence, la Commission européenne harmonise, tous les deux ans, les seuils prévus aux directives 2004/17/CE (marchés passés par les entités adjudicatrices), 2004/18/CE (marchés passés par les pouvoirs adjudicateurs) et 2009/81/CE (marchés passés dans les domaines de la défense et de la sécurité), avec ceux prévus par l’Accord sur les marchés publics. Par un règlement n°1251/2011 en date du 30 novembre 2011, obligatoire et directement applicable dans les Etats membres au 1er janvier 2012, la Commission européenne a donc modifié les seuils applicables aux marchés publics pour 2012-2013.

Par un décret du 29 décembre 2011, la France a modifié les seuils applicables à ses marchés et, plus largement, aux contrats de la commande publique soumis aux directives européennes.

Marchés passés par les pouvoirs adjudicateurs
Les pouvoirs adjudicateurs soumis au code des marchés publics doivent désormais respecter une procédure formalisée (appel d’offres – éventuellement par système d’acquisition dynamique − procédure négociée, dialogue compétitif ou concours) lorsque la valeur du marché est égale ou supérieure à :

- 130.000 euros H.T. pour les marchés de fournitures et de services de l’Etat ;
- 200.000 euros H.T. pour les marchés de fournitures et de services des collectivités territoriales et des établissements publics de santé, pour les marchés relatifs à certaines fournitures des pouvoirs adjudicateurs opérants dans le domaine de la défense – marchés non soumis à la troisième partie du code relative aux marchés de défense ou de sécurité − et pour les marchés de services de recherche et développement entièrement financés par le pouvoir adjudicateur et lorsque ce dernier acquiert la propriété exclusive des résultats ;
- 5.000.000 euros H.T. pour les marchés de travaux.

Les pouvoirs adjudicateurs soumis à l’ordonnance n°2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics, sont tenus de recourir aux procédures formalisées lorsque la valeur du marché est égale ou supérieure à :

- 200.000 euros H.T. pour les marchés de fournitures et de services (à l’exception de certains pouvoirs adjudicateurs − comme la Caisse des dépôts et consignations − soumis aux procédures formalisées dès le seuil de 130.000 euros H.T.) ;
- 5.000.000 euros H.T. pour les marchés de travaux.

Marchés passés par les entités adjudicatrices et marchés passés en matière de défense et de sécurité
Les seuils à compter desquels les entités adjudicatrices − notamment dans les secteurs de l’énergie, de l’eau, des services postaux, des transports ferroviaires, etc.− qu’elles soient soumises au code des marchés publics ou à l’ordonnance n°2005-649 du 6 juin 2005, sont tenues de recourir aux procédures formalisées (appel d’offres – éventuellement par système d’acquisition dynamique − procédure négociée ou concours) sont désormais les suivants :

- 400.000 euros H.T. pour les marchés de fournitures et de services ;
- 5.000.000 euros H.T. pour les marchés de travaux.

Ce sont les mêmes seuils qui s’imposent aux marchés passés dans les domaines de la défense et de la sécurité, en application de la troisième partie du code des marchés publics. A compter de ces seuils, l’acheteur public est tenu de suivre une procédure formalisée (procédure négociée, appel d’offre restreint ou dialogue compétitif).

Contrats de partenariat
Les contrats de partenariat public-privé passés en application de l’ordonnance n°2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat peuvent être conclus selon une procédure négociée lorsque leur valeur est inférieure aux seuils suivants :

- lorsque le contrat de partenariat n’a pas pour objet principal l’exécution – ou conjointement la conception et l’exécution – de travaux :
o 130.000 euros H.T. pour les contrats conclus par l’Etat ;
o 200.000 euros H.T. pour les contrats conclus par les collectivités territoriales ;
- lorsque le contrat de partenariat a pour objet principal l’exécution – ou conjointement la conception et l’exécution – de travaux : 5.000.000 euros H.T.

Concessions de travaux publics
Les pouvoirs adjudicateurs qui se proposent de conclure un contrat de concession de travaux publics doivent désormais publier un avis d’appel public à la concurrence lorsque la valeur du contrat est égale ou supérieur à 5.000.000 euros H.T.

Contrôle de légalité
Il faut enfin noter que l’obligation de transmission au préfet des conventions passées par les collectivités territoriales s’impose désormais lorsque la valeur du contrat est égale ou supérieure à 200.000 euros H.T.

Ces nouveaux seuils sont applicables à tous les contrats de la commande publique pour lesquelles une consultation a été engagée ou un avis d’appel public à la concurrence envoyé postérieurement au 1er janvier 2012.

En dessous de ces seuils, les pouvoirs adjudicateurs et les entités adjudicatrices peuvent passer des marchés selon une procédure adaptée, dont ils déterminent librement les modalités, sans toutefois s’écarter des principes constitutionnels encadrant l’ensemble des contrats publics : liberté d’accès à la commande publique, égalité de traitement entre les candidats, transparence des procédures et bonne utilisation des deniers publics (voir la décision du Conseil constitutionnel n°2003-473 DC du 26 juin 2003).

Rappelons enfin que par un décret n°2011-1853 du 9 décembre 2011, le pouvoir réglementaire, devançant la proposition de loi « Warsmann » relative à la simplification du droit, a relevé de 4.000 à 15.000 euros H.T. le seuil en deçà duquel les marchés peuvent être passés sans publicité ni mise en concurrence préalable, pourvu que le pouvoir adjudicateur « veille à choisir une offre répondant de manière pertinente au besoin, à faire une bonne utilisation des deniers publics et à ne pas contracter systématiquement avec un même prestataire lorsqu’il existe une pluralité d’offres potentielles susceptibles de répondre au besoin ».

Fort des enseignements de l’arrêt Perrez du 10 février 2010 (req. n°329100), le gouvernement prend désormais des précautions lorsqu’il régule l’exposition des acheteurs publics à la concurrence afin d’assurer, toujours, le respect des grands principes de la commande publique.


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