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Actionnariat salarié

- Wikipedia, 8/01/2012

L'actionnariat salarié est un dispositif d'épargne salariale qui vise à impliquer directement les salariés d'une entreprise dans le capital de cette dernière[1]. Il s'agit d'un dispositif relativement ancien de conciliation des intérêts du capital et du travail initié en France par le Général de Gaulle[2]. De nombreux dispositifs sont depuis venus enrichir cette pratique qui s'est considérablement développée ces dernières années[3].

L'actionnariat salarié est également perçu par certains comme un mécanisme de protection en cas de tentative de prise de contrôle inamicale d'une entreprise par une autre ou plus couramment par un investisseur institutionnel. L'actionnariat salarié se traduit parfois par une participation directe des salariés dans le gouvernement d'entreprise via un ou plusieurs postes au sein du conseil d'administration. Dans L'état social de la France, Jean-François Chantaraud présente les différentes formes de contrat social qui peuvent soutenir l'actionnariat salarié en s'appuyant les modèles de l'intelligence sociale.

Sommaire

Définition de l'Actionnariat Salarié en France

Pour Jean-Michel Oudjani [4]. Président de l'AdPA, l'actionnaire salarié est une personne physique qui est à la fois :

  • un collaborateur salarié ou un ancien collaborateur détenant des actions de son entreprise ou d'une entreprise liée dans le cadre d'un contrôle exclusif (code du commerce L233-16),
  • un actionnaire disposant d'un droit de vote aux assemblées générales qu'il exerce directement ou par l'intermédiaire du conseil de surveillance du FCPE.

L'actionnaire salarié possède légalement une fonction de décision. En tant qu'actionnaire, il peut exercer son droit de vote aux assemblées générales directement ou par l'intermédiaire du conseil de surveillance du FCPE.

Être actionnaire, pour le salarié ou un ancien salarié est à la fois un engagement et une motivation.Cette situation est parfois mal perçue par certains dirigeants qui utilisent le lien de subordination auquel est soumis tout salarié pour essayer de limiter leurs droits d’expression.

Comment devenir un Actionnaire Salarié ?

Les principaux moyens sont l’achat direct de titres,

• lors de la privatisation de l’entreprise. Traditionnellement, 10 % des titres offerts par l’Etat sont réservés aux salariés, • au moment d’une augmentation de capital réservée aux salariés. Il s’agit d’une décision souveraine de l’Assemblée Générale des actionnaires de l’entreprise. Parfois des conditions notamment d’ancienneté existent. Les salariés sont libres de souscrire ou non, • suite à la vente aux salariés d’actions préexistantes, qui seront versées sur un compte spécial, • lors d’attribution d’actions de l’entreprise dans le cadre de la participation, • en cas de distribution d’actions gratuites, existantes ou à émettre, aux salariés et mandataires sociaux des entreprises suite à une décision de l’assemblée générale des actionnaires, • par l’attribution d’options de souscription ou d’achat d’actions (stock options). Des salariés peuvent souscrire ou acheter des actions en bénéficiant généralement d’une certaine décote.

Dans de nombreux cas, les actionnaires salariés ont aussi la possibilité d’acheter directement sur le marché financier des titres de leur entreprise.

Les motivations des différents acteurs

Les principales motivations des salariés et des anciens salariés

- bénéficier d’un capital et de revenus supplémentaires Il s’agit d’une forme originale d’épargne liée aux résultats financiers de l’entreprise. Des fonds à formules permettent le cas échéant de se protéger contre la chute des cours de l’action. - pouvoir acquérir des actions de l’entreprise à un prix réduit Les entreprises ont la possibilité de proposer à leur personnel une réduction du prix de l’action cotée pouvant atteindre 20 %. L’employeur peut aussi proposer des formules d’abondement ou aider au financement. - être exonéré du paiement de plus-values En fonction des dispositions prévue s par la loi de Finance, le salarié ou l’ancien salarié bénéficie d’une exonération des charges sociales portant sur ses plus- values dans le cadre d’un P.E.E.. Les placements et les dividendes réinvestis sont aussi exonérés d’impôt sur le revenu et sur les plus-values - être associé à la vie de l’entreprise Le but est souvent de mieux comprendre le fonctionnement, les enjeux et la stratégie de l’entreprise, de bénéficier des mêmes informations que n’importe quel autre actionnaire. - apprendre et maîtriser une culture financière et économique L’actionnariat salarié permet d’acquérir des connaissances nouvelles et utiles dans le domaine économique et financier. Il renforce ainsi les capacités de discernement. Il contribue directement à la promotion de la citoyenneté et de la démocratie.

Les principales motivations des entreprises

- Renforcer la cohésion dans l’entreprise L’actionnariat salarié est un outil original de management qui permet de créer la cohésion entre les différents profils de personnels, de susciter l’intérêt et l’engagement des collaborateurs. - Assurer la stabilité du capital. La présence des actionnaires salariés au capital est un gage de confiance des collaborateurs dans l’avenir de leur entreprise. Elle est aussi une garantie contre des actions éventuelles d’investisseurs ou de financiers qui ne seraient pas compatibles avec les intérêts de cette même entreprise. - Former et sensibiliser les personnels aux enjeux de l’entreprise L’actionnariat salarié permet de sensibiliser les collaborateurs à l’environnement et aux enjeux. Il les aide ainsi à mieux comprendre le sens de certaines décisions et les évolutions. Il peut constituer un moyen efficace pour les inciter à s’adapter et à anticiper notamment par la formation. - Obtenir des labellisations spécifiques De plus en plus de fonds et d’institutions financières ou bancaires demandent que les dirigeants des entreprises qui les sollicitent notamment pour obtenir des prêts ou des cautions prouvent qu’ils disposent bien de l’adhésion de leur personnel. Il s’agit d’une forme originale d’assurance contre les risques sociaux. - Avoir une image positive et produire de la différenciation L’actionnariat salarié est le gage que les dirigeants comme les propriétaires de l’entreprise reconnaissent que leurs collaborateurs sont de véritables producteurs de richesses. Comme l’entreprise dispose ainsi d’une excellente réputation, il devient possible d’attirer et de conserver les talents et les meilleurs profils. - Répondre à des attentes Des dirigeants disposant d’une sensibilité particulière (humaniste, catholique…) souhaitent mettre en œuvre certaines de leurs convictions en associant leurs collaborateurs au fonctionnement de l’entreprise voire aux prises de certaines décisions. Ils souhaitent être cohérents en mettant en pratique dans la vie professionnelle des valeurs auxquelles ils adhèrent.

Les entreprises bénéficient aussi d’une exonération de charges sociales

Les principales motivations des Pouvoirs Publics

- Former et sensibiliser les personnels et les citoyens aux enjeux de l’entreprise - Diffuser une culture économique et d’entrepreneur - Concilier l’intérêt du capital et celui des salariés afin de favoriser des solidarités de fait - Conforter le management et l’indépendance de l’entreprise en rendant les salariés propriétaires même partiellement de leur entreprise - Prévenir des actions hostiles de la part de prédateurs économiques et/ou financiers, français et/ou étrangers contre l’entreprise et ses autres propriétaires - Lutter contre le pouvoir autocratique de certains dirigeants et les pratiques de patrons voyous en mettant en place de moyens d’informations - Promouvoir la transparence et l’éthique des affaires - Mettre en œuvre concrètement un projet de société qui renforce la citoyenneté et contribue à la dignité des personnes - Obliger les financiers et les investisseurs à prendre en considération les personnels et employés - Anticiper le développement et la valorisation de l’Actif immatériel

Les principales motivations des syndicats

Premier cas : les syndicats opposés à l'Actionnariat salarié

- L’Actionnariat Salarie est un alibi destiné à légitimer le libéralisme et le capitalisme

- L’Actionnariat-Salarié est un moyen utilisé par le patronat pour diviser les employés et affaiblir les représentants syndicaux

- L’Actionnariat-Salarié est trop peu important pour pouvoir peser sur les orientations des actionnaires dominants

- Il n’existe pas d’exemples de l’utilité réelle de l’Actionnariat Salarié

- Il existe d’autres modèles comme les SCOOP qui sont plus efficaces que l’actionnariat-salarié.

- L’absence de statut protecteur des associations d’actionnaires-salariés et de leurs dirigeants dans les entreprises ls rend vulnérable et à la merci des dirigeants.


Second cas : les syndicats favorables à l'Actionnariat Salarié

- L’Actionnariat Salarie est une forme d’expression des attentes des Salariés comme le sont les délégués du personnel et les syndicats. Chacun possède un champ qui lui est propre mais tous agissent dans le même sens : la protection des intérêts de l’entreprise et des ses employés.

- L’Actionnariat salarié permet de faire entendre la « voix des salariés et des employés » dans des instances de décision comme l’assemblée générale et le conseil d’administration

- Par leurs prises de position notamment sur les résolutions des assemblées générales, les actionnaires salariés disposent des moyens d’informer les marchés et les autres actionnaires sur leur perception comme sur la réalité de l’entreprise

- L’importance et la reconnaissance de l’Actionnariat Salarie illustrent concrètement la vision qu’ont les dirigeants de leur personnel

- Les prises de position de l’Actionnariat Salarie peuvent exprimer la confiance et l’adhésion des personnels vis-à-vis leurs actionnaires et de leurs dirigeants

- L’Actionnariat-Salarié permet de disposer de relais médiatiques et techniques supplémentaires pour influencer les dirigeants et les actionnaires

- L’Actionnariat-Salarié permet de disposer d’informations et de relais originaux

- L’importance de l’Actionnariat salarié est une garantie contre l’action de certains financiers ou actionnaires « prédateurs »

- L’Actionnariat-salarié est le contrepouvoir de la réalité interne de l’entreprise vis-à-vis de certains dirigeants ou actionnaires


Quelques grands défis pour mettre en œuvre l'Actionnariat Salarié

Dans L'état social de la France, Jean-François Chantaraud défini les différentes formes de contrat social qui peuvent soutenir l'actionnariat salarié. Pour Jean-Michel Oudjani, la réussite durable de l'Actionnariat Salarié en France nécessite le règlement préalable de certaines questions comme par exemple :

a) Comment concilier le lien de subordination des salariés avec leur qualité d’actionnaires ? Ils peuvent se trouver en opposition avec des dirigeants voire les intérêts d'autres actionnaires plus puissants.

b) Contrairement aux syndicalistes qui disposent d’un statut et d'une reconnaissance légale, les associations d’actionnaires salariés et leurs représentants ne bénéficient d’aucunes protections. Des dirigeants d'entreprise n’hésitent pas à utiliser des codes de déontologie et le règlement intérieur pour limiter la liberté d’expression de leurs employés et le développement des associations.

c) Comment protéger l’indépendance des associations d’actionnaires-salariés ? Des pratiques constatées dans certaines entreprises montrent que des associations d’actionnaires salariés (comme d'ailleurs les représentants des salariés dans les FCP) sont devenues des "chasses gardées". Des dirigeants et des représentants de certains syndicats bénéficient ainsi de certains privilèges et avantages en toute discrétion.

d) Comment favoriser la généralisation de l’actionnariat salarié ? Si les groupes et les entreprises disposant d’un actionnariat-salarié instituaient cette formule dans leurs filiales, notamment celles de type PME/PMI, le nombre d’entreprises bénéficiaires pourrait être multiplié par plus de dix en l’espace de peu de temps.

Les 28 propositions du Sénat

Le 29 Septembre 1999, Monsieur Jean CHÉRIOUX remet un rapport d’information réalisé au nom de la commission des Affaires sociales du Sénat proposant 28 mesures pour développer l’épargne salariale,

Améliorer l'information sur l'actionnariat salarié

1. Étendre les missions du Conseil supérieur de la participation à l'actionnariat salarié, en lui permettant notamment de disposer de l'ensemble des données sur ce sujet ; 2. Prévoir la présence d'un membre de la Commission des opérations de bourse au sein du Conseil supérieur de la participation ; 3. Réunir le Conseil supérieur de la participation au moins deux fois par an, conformément à la réglementation en vigueur. 4. Charger la Commission des opérations de bourse de contrôler la publication, dans le rapport annuel des sociétés, de l'état de la participation des salariés au capital social de l'entreprise, 5. Introduire une sanction en cas de non-publication, dans le rapport annuel des sociétés, de l'état de la participation des salariés au capital social de l'entreprise.

Encourager le développement des opérations d'actionnariat salarié dans les entreprises

6. Réserver aux salariés, à des conditions préférentielles, 5 % des actions émises par les sociétés lors d'une augmentation de capital ; 7. Relancer les " plans d'actionnariat " institués par la loi du 27 décembre 1973 en harmonisant leur régime avec celui de l'actionnariat salarié dans le cadre des plans d'épargne d'entreprise ; 8. Introduire la possibilité, dans le cadre d'un accord collectif, de moduler les aides financières de l'entreprise (décote et abondement) en fonction de la durée d'immobilisation des actions de l'entreprise acquises par le salarié, les aides pouvant alors dépasser les plafonds actuels si la durée d'immobilisation est supérieure à cinq ans ; 9. Actualiser le plafond d'abondement de l'entreprise dans le cadre du plan d'épargne d'entreprise en cas d'acquisition d'actions de l'entreprise par le salarié ; 10. Autoriser les entreprises non cotées à procéder à des augmentations de capital réservées aux adhérents du plan d'épargne d'entreprise avec une décote de 20 % sur l'évaluation des titres ; 11. Autoriser, lorsque le salarié change d'entreprise, le transfert hors prélèvement fiscal et social des sommes versées sur le plan d'épargne d'entreprise vers le plan d'épargne d'entreprise de la nouvelle société du salarié ; 12. Introduire un nouveau cas de déblocage anticipé de la réserve spéciale de participation en cas de souscription ou d'acquisition d'actions de la société par le salarié ; 13. Considérer les actions de son entreprise détenues par le salarié comme un " bien professionnel " et les exonérer en conséquence d'impôt de solidarité sur la fortune.

Favoriser la représentation des salariés actionnaires et améliorer leur participation à la vie de l'entreprise

14. Charger le Gouvernement de remettre un rapport au Parlement sur l'application des articles 93-1 et 129-2 de la loi du 24 juillet 1996 sur les sociétés commerciales (qui définissent les conditions de nomination des représentants des salariés actionnaires au conseil d'administration ou au conseil de surveillance de la société, lorsque les salariés détiennent plus de 5 % du capital social de celle-ci) ; 15. Confier à la Commission des opérations de bourse la mission de contrôler l'application des articles 93-1 et 129-2 de la loi du 24 juillet 1966 ; 16. Introduire la possibilité pour les actionnaires salariés, en cas de non-application des dispositions des articles 93-1 et 129-2 de la loi du 24 juillet 1966, de présenter, lors de la plus prochaine assemblée générale ordinaire, une motion tendant à modifier les statuts de la société pour permettre la nomination de représentants des salariés actionnaires au conseil d'administration ou au conseil de surveillance de la société ; 17. Abaisser de 10 % à 5 % des droits de vote attachés aux titres de capital de la société détenus par un fonds commun de placement d'entreprise le seuil à partir duquel le conseil de surveillance du fonds est composé à 75 % au moins de représentants des salariés actionnaires ; 18. Étendre la consultation des salariés actionnaires, prévue à l'article 161 de la loi du 24 juillet 1966 (désignation d'un ou de plusieurs mandataires pour les représenter à l'assemblée générale), à deux nouveaux cas : risque de prise de contrôle de la société et organisation des conditions de représentation des salariés actionnaires au conseil d'administration ou au conseil de surveillance de la société ; 19. Prévoir que, lorsqu'un fonds commun de placement d'entreprise gère des titres de capital de la société auxquels sont attachés plus de 5 % des droits de vote, le conseil de surveillance du fonds exerce ces droits de vote.

Assurer une meilleure protection des actionnaires salariés

20. Favoriser une contractualisation accrue des relations entre les conseils de surveillance des fonds communs de placement d'entreprise et les sociétés de gestion de ces fonds en généralisant la pratique des " mandats de gestion " pour une durée limitée mais renouvelable ; 21. Approfondir le stage de formation des membres de ces conseils de surveillance (article L. 441-1 du code du travail) en prévoyant une formation juridique et pas seulement économique.

Moderniser les autres formes de participation financière des salariés

22. Créer des plans d'épargne " inter-entreprises " afin de mieux impliquer les petites et moyennes entreprises dans l'épargne salariale ; 23. Étendre aux entreprises où sont présents des délégués du personnel les dispositions de l'article L. 444-3 du code du travail qui prévoit, dans les entreprises où aucun accord d'intéressement ou de participation n'est en vigueur, un examen annuel des conditions dans lesquelles les mécanismes de participation financière pourraient être mis en œuvre ; 24. Réviser les conditions de rémunération des comptes courants bloqués en fonction de l'évolution des taux du marché ; 25. Permettre aux sociétés holdings de calculer l'intéressement en fonction des résultats et des performances du groupe ; 26. Instituer, par accord collectif, des plans d'épargne d'entreprise à long terme dont la sortie en capital se ferait en franchise, pour tout ou partie, de CSG, de CRDS et de prélèvement social de 2 % à la condition que ce capital soit transféré à un " plan d'épargne retraite " ou à un organisme de gestion versant une rente viagère.

Mettre en place de nouvelles formes d'actionnariat salarié adaptées aux spécificités des entreprises

27. Assouplir le régime fiscal et social des plans d'options sur actions lorsque les plans concernent l'ensemble du personnel de l'entreprise (proportionnellement à leur rémunération) ; 28. Rétablir les Reprises de l'entreprise par les salariés (RES), sous le régime prévu par la loi du 17 juin 1987 sur l'épargne.

Notes et références

Espace Fiches Thématiques Actionnariat Salariés de l'AdPA CNP

Bibliographie

  • Les administrateurs salariés, un atout pour le gouvernement d’entreprise ?, Une étude empirique sur le SBF 250 (2000-2005), La Documentation française, Paris,
  • Les salariés capitalistes et la performance de l’entreprise, in Revue française de gestion, n° 183, p. 35-50

Articles connexes

Liens externes

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